26 septembre 2006

Blogosphère pm

Kiev, août 2006, DBM


Huit mois plus tard, le blog inspiré par Laurène a pris sa vitesse de croisière (Pourquoi un blog ?). Le cap des trente mille visites a été dépassé, des visites qui, au fil des mois, ont tout simplement doublé. Quant aux commentaires, qui étaient le point faible du premier bilan (Blogalement positif), ils ont explosé, puisque leur nombre a été multiplié par quatre. De plus, trolls et autres Denard ayant renoncé à leurs facéties, la modération du blog est de plus en plus modérée ! Seule remarque un peu restrictive, le débat est beaucoup plus animé par les posts polémiques que par ceux ouvrant un débat de fond. La démocratie "bloguicipative" a encore des progrès à accomplir.

Mais pour que ce bilan soit utile et interactif, j’aimerais utiliser ce post pour connaître un peu mieux mes lecteurs… d’ailleurs.

Les analyses fournies par Xiti permettent de connaître l’origine géographique d’environ les deux tiers des visiteurs du blog. Si on observe les résultats par région, c’est sans surprise l’Ile de France qui arrive en tête. Alors, qui êtes-vous, chers Franciliens ? Niçois exilés ou Parisiens curieux ?

Les régions de Genève, Bruxelles et la Province de Québec ne sont pas loin. Je subodore la présence de quelques étudiants réfugiés dans des OI ou des universités francophones, mais je n’en suis pas sûr : est-ce le cas ?

Même remarque pour les deux Etats américains les plus fidèles, la Californie et la Floride. Le Languedoc-Roussillon est également présent, alors qu’à mon grand dam, la Bourgogne (ma région natale) et New York (ma ville préférée) sont assez discrètes.

La Bretagne et la Guadeloupe ont été présentes le temps des vacances : des Niçois fidèles avec ordinateurs portables ?

Enfin, la régularité de correspondance avec le Royaume-Uni, la Suède, le Maroc, Monaco et l’Australie laisse supposer là aussi quelques fidélités (encore que pour les deux dernières, j’ai mon idée, n’est-ce pas Jean-Sébastien ? N’est-ce pas John ?)

Visiteurs d’ailleurs, laissez-moi un commentaire ou un mail pour me dire qui vous êtes, même en gardant votre « anonymous ». Ainsi je pourrai multiplier les clins d’œil amicaux au cours de mes prochains posts.

Indigènes

Pour la deuxième semaine consécutive, un film de Cannes fait la une de l’actualité (Quand j’étais chanteur). Il s’agit de l’émouvant film de Rachid Bouchareb, Indigènes, que j’avais apprécié sur la Croisette, malgré une critique un peu réservée (C’est nous les Africains). Au final, le film avait quand même figuré au palmarès (Les vingt quatre dernières marches).

Ce film, qui évoque le rôle des deux cent cinquante mille soldats issus de nos colonies pendant la deuxième guerre mondiale, était à la fois juste et utile. Utile, peut-être plus que je ne le pensais à l’époque, puisqu’il aurait apparemment, au début du mois de septembre, ému Bernadette (pas Soubirou, l’autre…) qui, du coup, aurait fait la morale à son Président de mari pour qu’il respecte enfin sa promesse de 1995, réitérée en 2002. Ainsi, les quatre vingt mille spahis, goumiers et autres tirailleurs sénégalais encore vivants verraient leur pension enfin revalorisée. C’est qu’à l’heure actuelle, la pension d’un "indigène" représente à peine le tiers de celle d’un ancien combattant français. Faire cesser ce scandale serait une juste réparation matérielle et surtout un formidable mea culpa de cette France qui hier a trop semé la rancœur pour s’étonner de récolter aujourd’hui la haine. Une telle compensation permettra peut-être à ceux que le journal Le Monde appelle les « arrière-petits-enfants des indigènes de 1944 » de ne plus se sentir tout à fait, dans le 9.3, des indigènes de la République.

Le plan d’Estrosi, le PLU de Peyrat

En ce lundi, revue d ‘effectifs de l’UMP locale.

11 heures. Palais de la préfecture. Séance extraordinaire du Conseil général pour présenter le énième plan départemental décliné depuis l’arrivée d’Estrosi à la Présidence. Après le logement, la gérontologie, les points noirs, la santé, nous voilà nantis d’un magnifique "plan Jeunes". Toujours le même principe : un domaine ne faisant pas partie des compétences du département (ce qui permet de répondre aux critiques en disant : « de toute façon, on n’était pas obligé de le faire »), une présentation à grand spectacle, publicité maximum dans la presse. Les contribuables financent ainsi eux-mêmes la propagande qui leur explique combien la vie est belle dans le département enchanté de Christian. Ce matin, le plan fleure bon l’électoralisme, puisqu’il s’agit, non pas d’un plan Jeunes, mais plus prosaïquement, d’un plan jeunes électeurs, les étudiants étant largement privilégiés puisque supposés majeurs et inscrits sur les listes électorales. Ce qui n’empêche pas le Président, qui a l’épiderme fragile, d’accuser PS et PCF de faire de la politique politicienne pour avoir critiqué certains aspects du dispositif. Christian Estrosi en ange asexué et immaculé de la politique, voilà qui est inattendu.

17 heures 30. Autre lieu, autre ambiance. Présentation "publique" (trente personnes, pour la plupart des professionnels de l’immobiliser…) du PLU au MAMAC par la mairie de Nice. Là, nous sommes bien dans le cadre d’une compétence obligatoire. Et quelle compétence ! Il s’agit du développement de la ville pendant plusieurs décennies. Prévue en septembre, la première phase opérationnelle a été repoussée en octobre puis en novembre, les responsables politiques de la municipalité étant incapables de suivre leur propre calendrier, malgré une bonne volonté évidente des fonctionnaires. D’où cette réunion un peu surréaliste, simple information sur le territoire niçois, sans aucune direction, sans aucune directive. Rien ou presque sur le logement social, problème numéro un de la ville, rien sur la plaine du Var, seule zone permettant de rééquilibrer la géographie urbaine. Aux questions posées, l’adjointe répond benoîtement : « on verra, on verra ». Son PLU est en fait le symbole de la gestion de la ville depuis 1995, une gestion sans souffle, sans perspective, sans projet. Une gestion qui a élevé la politique du chien crevé au fil de l’eau au rang des beaux arts.

Plan d’Estrosi, PLU de Peyrat, électoralisme et incompétence, esbroufe et insuffisance : que l’UMP est belle dans le 06.

24 septembre 2006

Le syndrome de Budapest

Ce soir, à Acropolis, grand meeting socialiste avec le Premier secrétaire, François Hollande himself. Ne figurant pas parmi les orateurs de la soirée, je peux donc observer avec un certain recul, les prestations de mes congénères. En réalité, cette soirée intervient un peu trop tôt, chacun ayant le regard dirigé vers la désignation du candidat en novembre. D’où une salle à la fois bien remplie mais plutôt tiède dans ses réactions.

Après une petite intervention de l'animateur du MJS sur le thème « Le projet avant tout, le candidat, ce n’est pas important », Paul Cuturello se livre, sur le même thème, à un certain nombre de figures imposées, avant de se lancer dans une analyse documentée et brillante sur le logement retrouvant à cette occasion son allant du Conseil municipal.

Patrick Allemand lui, a fait la démonstration que son imprimante fonctionnait mal, puisque, à l’évidence, une ligne de son discours a sauté… celle où, dans sa longue démonstration sur les progrès de la gauche à Nice, il devait sans aucun doute parler des élections municipales de 2001 et du score historique de Nice plurielle… ! Cela dit, le discours était plutôt rigolo surtout quand il a évoqué les tongs et les préservatifs de l’UMP.

François Hollande, quant à lui, fonction oblige, reste très prudent sur la question présidentielle, voire même sur nos propositions. Il ne développera que la CPU (couverture professionnelle universelle) et l’allocation d’autonomie pour les étudiants. En fait son discours consiste avant tout à critiquer la droite avec talent. A l’évidence, il connaît son sujet et les dernières aventures de Sarko sont passées au peigne de son humour corrosif. Mais on sent bien que le grand discours, ce sera au candidat à la Présidence de le prononcer. Sur ce qu’il a dit ce soir, il ne semble pas considérer qu’il puisse être ce candidat-là. Malgré les encouragements de Frédérique Grégoire, le comparant à la fois à Jaurès, Mendès France et François Mitterrand… Excusez du peu…

Finalement, seule Dominique (Boy-Mottard), peut-être parce qu’elle n’a pas d’obligations institutionnelles, dénonce l’histoire limite "bibliothèque rose" qui consiste à voir notre candidat mener campagne avec les seules écritures saintes du projet. Elle rappelle d’abord qu’il y en a forcément plusieurs lectures, que, par exemple, mettre en avant le pouvoir d’achat ou la sécurité, ce n’est pas tout à fait la même chose. Ensuite, elle insiste sur le fait que le document est très faible sur des sujets essentiels, sur lesquels le candidat sera fatalement interpellé. Elle cite l’avenir des retraites, celui de la sécurité sociale, l’Europe, et son corollaire, le rééquilibrage nord-sud.

« Notre candidat devra aller au-delà de ce qui figure aujourd’hui dans notre projet. C’est indispensable si on veut éviter d’être confronté plus tard au syndrome de Budapest. Ce n’est pas parce que les manifestations actuelles en Hongrie sont inspirées par les nationalistes, qu’il ne faut pas retenir le message. Il s’agit moins en l’espèce de promesses non tenues que de remèdes qui n’ont pas été annoncés à l’avance. Tout le monde sait bien que ces remèdes sont indispensables et qu’il n’y aurait rien de pire pour le peuple hongrois que de voir les socio-démocrates écartés du pouvoir ; mais on le lui a caché. Nous devons toujours avoir à l’esprit – et notre candidat avec nous – que les peuples sont adultes et qu’ils ont le droit de savoir ce que nous avons l’intention de faire. Parce que mentir par omission, c’est encore mentir. Donc, notre candidat devra préciser notre projet, notamment sur ces questions-là » (…).

« En clair, j’attends du prochain Président de la République qu’il fasse des propositions précises et qu’il lance une politique permettant le développement des pays du Sud. Il y a des tas de bonnes raisons à cela, mais il en est une essentielle. Nous devons le faire parce que c’est juste.
C’est juste parce qu’on ne peut plus tolérer la misère qui pousse les Africains à se heurter au détroit de Gibraltar.
C’est juste parce qu’on ne peut plus tolérer que des hommes meurent noyés au large des côtes italiennes.
C’est juste parce qu’on ne peut non plus admettre que des hommes, des femmes, des enfants soient traités comme ils l’ont été ces derniers jours à Cachan ».

Quand Dominique conclut en disant « Chers amis, chers camarades, un autre monde est sûrement possible. Peut-être même souhaitable. Mais la politique, c’est, avant tout, régler les problèmes dans un monde réel, pas dans un monde utopique. C’est bien pour cela que nous serons tous, dans quelques semaines, rassemblés derrière notre candidat. Avec une grande ambition : rendre un peu meilleur le monde réel », j’avoue que je suis assez fier de notre candidate dans la deuxième circonscription.

Et quand, en sortant du meeting, François Hollande me dit gentiment « Patrick, tu sais, nous avons des femmes de talent », ajoutant « Mais on ne s’en plaint pas », j’acquiesce non par convenance mais par conviction.

21 septembre 2006

Béatrix Kiddo a-t-elle une âme ?

C’est en équipe, avec une jeune collègue, que j’entame cet après-midi le marathon automnal des soutenances de mémoires en sciences de l’information et de la communication. Les deux livraisons du jour sont particulièrement intéressantes pour un prof cinéphile, amateur de surcroît de séries télévisées.

Vincent nous présente une analyse pertinente de South Park, la série la plus décapante du moment, sur l’Amérique profonde et ses contradictions. Un travail passionnant qui me donne instantanément d’aller acheter à la FNAC au plus vite les dix saisons disponibles de cette série d’animation.

Laurent, quant à lui, présente une réflexion plutôt nourrie sur « Quentin Tarentino, le cinéaste de la citation ». Je me souviens immédiatement de cette soirée de 1994 où, très mal assis au premier rang d’un palais des Festivals bondé, j’ai assisté médusé à la projection de Pulp fiction. Immédiatement subjugué par l’inventivité jubilatoire de ce jeune cinéaste presque inconnu, je ne fus pas surpris, quelques jours plus tard, quand, au même endroit, je le vis recevoir la Palme d’or.

Pulp fiction, mais aussi Reservoir dogs, Jackie Brown, et Kill Bill 1 et 2, rien n’est à jeter dans cette œuvre en devenir. Mais le travail de l’étudiant est surtout centré sur la cinéphilie de Tarentino, sa capacité à s’emparer d’autres univers, à citer d’autres films dans une œuvre pourtant très personnelle. C’est ainsi que l’auteur de Kill Bill s’est inspiré bien sûr du cinéma américain, des films de karaté, du western spaghetti, mais aussi de réalisateurs européens comme Godard ou Jean-Pierre Melville. Le mémoire fait notamment un comparatif étonnant entre certaines scènes de Pulp fiction et du Deuxième souffle.

Cela dit, si elle ne veut pas devenir un procédé, la citation a ses limites. Ma collègue reproche à Tarentino d’avoir franchi la limite, précisément dans Kill Bill, qu’elle qualifie de film vain. Pour ma part, je la trouve un peu sévère. L’extraordinaire imagination et le talent de cinéaste de Tarentino lui permettent une fois de plus de donner le change. Pour moi, Kill Bill n’est pas le film de trop, mais une sorte d’apothéose anthologique du cinéma de genre avec des morceaux de bravoure inoubliables (par exemple, l’incroyable scène du réveil des orteils de la mariée après son long coma).

Cela dit, une apothéose est aussi une fin, et le réalisateur américain va devoir, selon moi, changer de registre. Dans son introduction, l’étudiant rappelle que les mauvais cinéastes n’ont pas d’idées, que les bons en ont trop, mais que les grands en ont une qu’ils déclinent à l’infini. Cette grande idée, Tarentino, à l’évidence, ne l’a pas encore trouvée. Son univers de femmes fatales (merci Uma Thurman) et de voyous pittoresques est trop proche de la BD pour vraiment exister. Dans Kill Bill, Tarentino a permis à Béatrix Kiddo, alias la mariée, de se venger spectaculairement, brillamment, définitivement. Le réalisateur doit désormais nous prouver qu’elle a une âme. Et lui une grande idée.

20 septembre 2006

Le Var et la Grande Bleue

Françoise Rousset, Histoire de gens sur le damier

Awa est une jolie étudiante Sénégalaise ; Benoît, Niçois de naissance, est cuisinier de métier. Ils ont un peu plus de vingt-cinq ans, la vie devant eux et je viens de les marier. Mon discours républicain est donc tout naturellement un hommage à la mixité. Cette mixité, source de joie de vivre, de vitalité et de beauté, si nécessaire au rayonnement et au dynamisme de notre cité.

Cet hommage prend la forme insolite d’un petit voyage… en avion ! Il s’agit, en effet, de survoler notre région.

« … Juste avant d’atterrir sur l’aéroport de Nice, l’avion suit la côte azuréenne : Estérel, Cannes, îles de Lérins, Cap d’Antibes, et enfin embouchure du Var.

C’est à la verticale de celle-ci que je vous propose de nous arrêter quelques instants. En effet, à la saison de la fonte des neiges, le spectacle est saisissant.

Les eaux boueuses du fleuve, en refusant de se mélanger à la Méditerranée, dessinent dans la mer un demi-cercle spectaculaire à la fois par ses dimensions et par la netteté de son contour. Si le soleil brille et si l’avion n’est pas trop pressé, l’image est magnifique. La mer a beau déployer sa séduction, le fleuve aux eaux gorgées de toutes ces parcelles de vie arrachées aux montagne résiste. Il refuse de se dissoudre directement dans la Grande Bleue.

Bien sûr, il le fera plus tard, plus loin. Mais, par son étonnante résistance, c’est comme s’il voulait signifier que cette union ne sera jamais un mélange mais la communion de ses mystères avec la mer toujours recommencée…

Nous ne sommes pas très loin de la cérémonie d’aujourd’hui. Il en est des couples comme des fleuves et des mers, les différences sont toujours source de richesse et de force.

Awa, Benoît,
La culture, l’histoire familiale et le destin individuel de chacun sont des cadeaux que l’on offre à l’autre. Il vous faudra avoir la fierté du Var et la patience de la Méditerranée, en ne mélangeant pas trop vite votre double héritage. La recherche du plus petit dénominateur commun rend l’eau grise et l’existence médiocre.

Awa, Benoît,
Revendiquez et protégez mutuellement vos différences.
Ce sont elles qui feront la force de votre couple.
Ce sont elles qui vous permettront, sur la mer toujours recommencée, d’aller au delà de l’horizon ».

18 septembre 2006

La justice des imbéciles

Il y a vingt-cinq ans, jour pour jour, la peine de mort était abolie en France. Lénine affirmait, à propos des pogroms, que l’antisémitisme était le socialisme des imbéciles. Pour ma part, j’ai toujours été persuadé que la peine de mort était, elle, la justice des imbéciles. Celle des Fouquier-Tinville de comptoir et des tricoteuses cathodiques.

Il n’y a aucune justification rationnelle à ce châtiment. Chacun sait que dans les pays abolitionnistes le nombre des crimes de sang a reculé (probablement pas grâce à l’abolition de la peine de mort, mais malgré elle). Aux Etats-Unis, le nombre de ces crimes a augmenté parallèlement à l’introduction de la peine de mort dans une majorité d’états.

Mais quand bien même, il y aurait un, dix, cent arguments rationnels en faveur de la peine de mort, cela ne changerait en rien ce constat fondamental : une société d’hommes libres ne peut pas se défendre avec des moyens qui reposent sur sa négation. La mort socialement organisée légitime le crime de sang individuel.

En ce jour, c’est donc avec émotion que je pense à François Mitterrand et Robert Badinter.

À François Mitterrand, qui a osé, à quelques semaines d’une élection à la fois décisive et incertaine, braver l’opinion publique et les sondages pour imposer une réforme supposée très impopulaire. Une réforme que ses prédécesseurs avaient lâchement refusée.

À Robert Badinter, qui a su retrouver les accents de Victor Hugo et de son « Journal d’un condamné à mort » pour mener à son terme ce combat, avec une dignité à laquelle ne nous habituent pas toujours les avocats pénalistes. Quelle fierté de pouvoir se dire rétrospectivement : « c’étaient les miens, ils l’ont fait, et j’étais là avec eux »… Que la politique est belle dans ces moments-là.

Depuis, l’abolition de la peine de mort est devenue un enjeu de civilisation, le symbole de ceux qui militent pour une conception humaniste du monde.

L’Europe est au centre de ce symbole puisqu’il faut renoncer à la peine de mort pour entrer dans l’Union Européenne. Face aux shérifs texans, aux geôliers chinois, aux ayatollahs de toute obédience, à tous les mercenaires zélés de la barbarie institutionnelle, elle résiste. Et nous, nous sommes fiers d’elle.

16 septembre 2006

Acropolis, adieu


Plus de huit heures pour un Conseil municipal de rentrée un peu ronronnant. Rien avoir avec celui de juillet (Tacite tacle Peyrat). Il est vrai que le principal dossier (le P.L.U.) avait été retiré au dernier moment et reporté au mois d’octobre voire plus tard… Quand on sait l’importance de la planification urbaine pour l’avenir d’une ville comme Nice, on ne peut qu’être stupéfait par autant de désinvolture dans l’incompétence (à moins que ce ne soit l’inverse…).

Incompétence que nous retrouvons également en ce qui concerne le dossier Acropolis. Un dossier pour lequel le maire nous demande benoîtement de lui voter les pleins pouvoirs afin qu’il puisse trouver un délégataire par une négociation directe. Comme en 1998, comme en 2005. Les deux premières fois, le maire avait purement et simplement reconduit l’association Nice Acropolis, dernière survivante de la gestion médeciniste, une structure trop légère qui n’a pas pu assurer les investissements nécessaires à l’évolution d’un palais qui, après avoir connu son heure de gloire, est désormais complètement dépassé. Pour la première fois, le maire évoque la reprise du palais en régie directe. C’est alors que je lui rappelle qu’il s’agit là d’un hommage du vice à la vertu, cette solution étant celle de Nice démocratie en 1998 et de Nice plurielle depuis 2001. On dit généralement qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire. Pourtant, face à la concurrence internationale, nationale et même régionale (Monaco, Cannes) des autres palais, il est bien tard. Peut-être même trop tard.

Blocage également en ce qui concerne le dossier Libération – nouvelle mairie. La majorité municipale se trouve dans l’incapacité de trouver un privé pour réaliser et gérer le parking souterrain qui constitue la première phase de l’opération. Et le maire d’avouer, mezzo vocce, que rien d’essentiel ne sera réalisé dans le quartier avant la fin de son deuxième mandat. J’ironise sur cet état de fait, tout en pensant avec amertume à l’état du sud du 5e canton.

En ce qui concerne la semaine de quatre jours (la guerre des quatre jours), Nice plurielle décide finalement de s’abstenir (à l’exception des copains du PCF et de Bruno qui votent contre). Il s’agit d’acter la forte volonté des parents et des enseignants en faveur de la semaine des quatre jours tout en pointant les conséquences d’une telle réforme pour les plus modestes dans une ville où l’éducation populaire est réduite à la portion congrue.

Le Conseil se termine par un camouflet pour le maire. En effet, celui-ci stigmatise régulièrement Nice plurielle et son président, en leur reprochant leur propension à transformer le Conseil municipal en arène politique (lui, bien sûr, flottant dans l’éther de la gestion humaniste). Et bien, le donneur de leçon se fait prendre les doigts dans le pot de confiture. Je présente au Conseil une lettre signée « Peyrat » demandant aux conseillers de quartier… d’adhérer à l’Entente républicaine, le parti du maire (et éventuellement à Nice Présence, l’association caritative de Madame, pièces jaunes et petits fours !). Devant cette preuve, le sénateur-maire hésite quelques secondes avant de dire un peu piteusement : « ce n’est pas bien ; on n’aurait pas dû le faire ».

Pour ne pas assister à l’exécution capitale de l’adjoint Vérola – je ne sais d’ailleurs pas ce qui, de l’acharnement du bourreau ou de la passivité de la victime me révolte le plus – je quitte le Conseil avant sa conclusion officielle.

Pour changer d’air.

C’est que ce soir j’ai rendez-vous avec les amis de ma section, là-bas, au bout du Vallon des Fleurs, dans le mythique restaurant des Palmiers. Il est dix-neuf heures quand je retrouve : Annie, Antoine, Anne, Alain L, Alain M, Anne-Marie B, Anne-Marie K, Alice, Antonin, Andrée, André, Albert, Amel, Bernard, Bernadette, Clotilde, Claudine, Cécile, Claude, Danielle, Daniel, Dario, Denise, Dominique, Elsa, Eliane, Edith, Emmanuelle, Fabrice, Francine, Fernand, Françoise, Gisèle, Gérard R, Gérard B, Gérard C, Gérard E, Grâce, Ghislaine, Jérôme, Hilde, Henriette, Henri, Hélène, Jacky, Justin, Jurek, Jean-Claude , Jean-Claude Q, Joëlle, Joël, Jocelyne N, Jocelyne M, Jean-Marc, Jeanine, Jean-François, Jacques, Jean-Pierre, Jean-Paul, Jean-Sébastien, Kamel, Luc, Laurent P, Laurent W, Loïc, Lucien, Louis, Marc, Mohamed, Marion, Maurice, Martine, Marie-Laure, Maryse, Marie-Lou, Marie, Madeleine, Michèle, Michel, Marika, Nahed, Nadine, nicolas, Odette, Pierre, Pascale, Patrick B, Patrice, Philippe B, Philippe F, Paul P, Paul C, Raphaël, Roger, Richard, Romane, Robert, Sébastien, Santa, Sami, Sylvie C, Sylvie D, Simone, Saïd, Salem, Vincent, Yveline, Yvette, Yassine et Zineb.



Et la soirée fut longue, chaleureuse et fraternelle. Surtout fraternelle.

14 septembre 2006

Quand j’étais chanteur

Sortie en salle du très joli film de Xavier Giannoli, «Quand j’étais chanteur». J’ai vu ce film au milieu des embouteillages cinématographiques du festival de Cannes et, malgré la concurrence, je l’avais beaucoup aimé. Je confirme en tous points mon commentaire favorable de l’époque (Pour un flirt avec toi…). Mais il en est des films comme des souvenirs gastronomiques et des histoires d’amour, certains peuvent s’enraciner dans votre mémoire dans des proportions insoupçonnées au moment de l’événement lui-même. Tel est le cas du film de Giannoli qui, avec le recul, est devenu pour moi un film rare, avec une histoire d’amour totalement improbable et pourtant complètement crédible, une histoire digne et belle, comme on en trouve si peu dans le cinéma français d’aujourd’hui.

Mais «Quand j’étais chanteur» va bien au-delà. C’est aussi, à travers le personnage de Depardieu, chanteur de bal, un film sur la nostalgie, un film qui nous explique que la nostalgie est peut-être le seul remède contre la mélancolie car elle nous permet d’avoir plusieurs vies.

13 septembre 2006

La guerre des quatre jours

Une fois de plus, militants socialistes, communistes, verts, alternatifs et associatifs se retrouvent au CLAJ pour préparer le Conseil municipal.

D’emblée, nous évoquons les dossiers du terrain Sulzer et de la Mission Locale. Mais depuis notre rendez-vous de juillet (Carton rouge pour Peyrat), c’est l’affaire du Grand stade qui défraie la chronique pourtant bien nourrie des échecs municipaux. Sur ce dossier, nous constatons collectivement que le positionnement de Nice plurielle était correct et que nos interventions au Conseil municipal, notamment celle de Bruno Della Sudda au dernier) ont probablement précipité la décision du Préfet, par ailleurs aiguillonné par le recours de Jean-François Knecht.

Ainsi, une fois de plus, nous avons protégé la légalité républicaine, les finances publiques et les intérêts des supporters (Emirates stadium of Saint Isidore).

Sur le deuxième grand dossier de la soirée, le P.L.U., Paul Cuturello nous explique la difficile gestation d’un document pourtant vital pour l’avenir de la cité. Même si Simone Monticelli – et c’est toute la richesse de Nice Plurielle – est nettement plus nuancée dans la critique. Quoi qu’il en soit, le groupe va travailler prioritairement ce dossier qui sera au centre du Conseil d’octobre. Nous veillerons particulièrement à être clairs vis-à-vis de nos concitoyens sur les deux questions centrales que sont le logement et l’avenir de la Plaine du Var.

Après une analyse fine du Plan paysage par Mari-Luz Nicaise, le constat de la nouvelle impasse dans laquelle la majorité municipale a engagé le Palais Acropolis, et un rapide échange sur l’organisation du futur séminaire de notre groupe sur la démocratie participative, un débat de qualité s’engage autour de la délibération 10.3 sur l’aménagement des rythmes scolaires et la semaine de quatre jours (un débat qui n’est pas sans rapport d’ailleurs avec celui portant sur la carte scolaire).

Pour Bruno Della Sudda, qui lance la discussion, cette mesure n’est pas souhaitable car source d’inégalités sociales. Henri Cottalorda l’approuve en rappelant qu’à Nice, la situation est aggravée par le fait qu’on ne donne pas à l’éducation populaire (Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port) des moyens suffisants pour organiser les loisirs des enfants les plus modestes. Michèle Matringe, tout en partageant cette analyse, fait remarquer que la pression des parents et de la société est forte et qu’il nous sera difficile de résister à cette volonté dont elle a pu mesurer la force en tant que proviseur. Frédérique Grégoire estime, quant à elle, que cette semaine de quatre jours est une opportunité pour les familles recomposées. Le parent qui n’a pas la garde des enfants peut tisser une relation plus suivie avec ceux-ci. Les interventions sont nombreuses, diverses, même si une majorité semble toutefois se dégager contre une évolution sur laquelle, dit-on, un certain nombre de villes seraient revenues.

Il est vingt-trois heures. Je conclus la séance par une démonstration (alimentée par Claude Giauffret) qui confirme que le Sénateur-maire ne recule devant rien pour muscler ses faibles troupes. Mais de cela – discrétion oblige – nous reparlerons vendredi.

11 septembre 2006

Les vendanges de l'amour

Depuis la rentrée, les mariages se succèdent : Fatiha et Paul, Catherine et Michel, Sigrid et Henri, Dorothée et Nicolas…

Bien sûr, il s’agit de couples qui m’ont choisi comme officier d’état civil, parce qu’ils partageaient mes valeurs ou tout simplement par amitié. Mais, même ainsi ciblés, ils représentent un échantillon tout à fait significatif de la sociologie de la ville, de sa diversité, de sa richesse.

Qu’on en juge.

Fatiha et Paul. Tous deux quinquas. Il est Gallois et travaille dans le bâtiment. Elle est niçoise d’origine kabyle et poursuit une carrière dans le social. Ils vivent dans le Vieux-Nice. Le public est nombreux, chaleureux, plutôt jeune. J’articule mon discours républicain autour de la chanson « les mots d’amour » de… Benabar, ce qui prouve que je ne suis pas sectaire (voir Camille). Du coup, les (grands) enfants de la mariée pleurent. Tout simplement.

Catherine et Michel. Deux commerçants niçois et quadras. Bien implantés dans l’ouest de la ville, leur réseau relationnel est forcément important, mais ils ont souhaité un mariage minimaliste, en semaine. Il le sera, puisqu’il n’y aura pour toute assistance que deux témoins, dont le père de la mariée. Je leur fais remarquer que mon propre mariage en Amérique fut encore plus sobre puisque… sans témoins ! Un repas chaleureux prolongera toutefois la modeste cérémonie du côté de Gairaut. Je peux assurer qu’il ne fut pas minimaliste.

Sigrid et Henri. Trentenaires. Henri est prof de maths, ce qui réveille en moi quelques mauvais souvenirs. Mais comme le marié est sympathique, je ne lui en veux pas pour autant. D’origine espagnole, il me présente son père madrilène et c’est ainsi que je me rends compte que j’ai l’honneur de célébrer un mariage devant le Directeur de cabinet du dernier ministre de la Culture de Felipe Gonzales. PSOE bien sûr. Niçoise d’origine pied-noir, la mariée, qui a travaillé à la mairie, a un sourire de Madone.

Dorothée et Nicolas. Un couple jeune, très jeune, pas encore vingt-cinq ans. Elle est la fille d’un cadre important du mouvement mutualiste de notre ville. Nicolas, lui, a accompli le rêve de Johnny Hallyday… Il est de nationalité belge. La salle est bondée et particulièrement enthousiaste. J’ai l’immense bonheur de retrouver Cléo qui est venue avec ses parents.

Demain, ce sera Awa et Benoït, Anna et Rosimaldo et bien d’autres… Décidément, cette année, les vendanges de l’amour sont particulièrement prolifiques…

09 septembre 2006

Orange mécanique au CP

On se souvient tous du "héros" de Kubrick. Alex, délinquant ultra-violent, subit une cure de décriminalisation qui le conduit à parcourir à l’envers le chemin qui l’a mené au laboratoire. On lui rend sa liberté après une dernière épreuve publique où il lèche littéralement et volontairement les bottes de l’homme qui vient de le rosser. Devenu un sous-homme, il va, à partir de là, essayer de se suicider…

Et bien, on n’arrête pas le progrès. Cet hiver, le gouvernement avait intégré à son projet de loi sur la prévention de la délinquance des "recommandations" issues d’un rapport de l’INSERM portant sur la détection des troubles de conduite chez le jeune enfant. L'émotion que ce projet avait suscitée parmi les psychologues, les médecins spécialistes de l'enfance (pédiatres comme psychiatres), le corps enseignant et les parents d’élèves, avait conduit le gouvernement à faire marche arrière. Les recommandations de l'INSERM ont donc disparu de la loi sur la délinquance..... pour mieux réapparaître dans le projet de loi sur la protection de l'enfance (sic), une loi qui s’inspire des conclusions du rapport. « …nécessité d’introduire dans le carnet de santé de l’enfant quelques items permettant de repérer les signes précurseurs du trouble de conduite parmi lesquels les agressions physiques (s’est bagarré, a attaqué physiquement, a frappé, a mordu, a donné des coups de pieds), l’opposition (refuse d’obéir, n’a pas de remords, ne change pas de conduite), l’hyperactivité (ne peut pas rester en place, remue sans cesse, n’attend pas son tour) ». Les difficultés de langage sont également mises à l'index ainsi que les comportements faisant preuve d'une trop grande curiosité (re-sic).

La détection de ces « troubles de conduite », prévue pour être organisée au cours de visites médicales obligatoires, permettra ainsi de détecter les futurs Alex et donc de pouvoir les traiter à partir de six ans (le rapport, lui, préconisait… trois ans). Concernant les traitements, si des méthodes de psychothérapies comportementales sont envisagées dans un premier temps (quelques semaines...), le rapport indique bien vite que la pharmacopée permet de résoudre bien des problèmes, et pas seulement ceux liés à un trop grande agressivité.

Ainsi détecté à trois ou six ans, sans aucun risque d'erreur - vous pouvez l'imaginer ! -, le potentiel Alex pourra être traité pour la tranquillité de chacun et pour le plus grand profit des laboratoires pharmaceutiques dont les consultants appartiennent parfois à l'INSERM (il faut néanmoins noter que de nombreux chercheurs se sont élevés contre les conclusions du rapport).

La majorité UMP du Sénat a déjà acté ce projet de "civilisation", il ne faut plus que l'accord de leurs amis de l'Assemblée Nationale pour que la loi ait force et vigueur. Une très forte mobilisation (près de deux cent mille pétitionnaires) avait permis de juguler la première offensive (projet de loi sur la prévention de la délinquance). La seconde offensive se développant, il faudra lui apporter une réponse appropriée (pour signer la pétition qui reste plus que jamais d'actualité, se rendre sur http://www.pasde0deconduite.ras.eu.org).

Résister à la privatisation de GDF, c’est bien ; se battre pour éviter un avenir à la Anthony Burgess est encore plus important.

07 septembre 2006

Le projet d'Antonin

« Le futur maire devra susciter l’envie d’aimer à nouveau sa ville, de se la réapproprier… ». Ainsi commence le projet d’Antonin. Vaste programme !

Chaque semaine, presque chaque jour, je suis "bombardé" à l’approche de l’échéance de 2008 de fiches, de rapports, de propositions programmatiques… et d’offres de services. Aujourd’hui pourtant, le document que j’ai sous les yeux a une valeur particulière. C’est le fruit des réflexions du militant-citoyen Antonin pendant ses vacances.

Ce cadre du BTP, qui habite avec sa famille dans les quartiers Est, a un statut à part dans l’équipe qui m’entoure. Il restera toujours pour moi cet homme qui a poussé, il y a quatre ans, la porte de mon bureau en mairie, pour me dire simplement : « Monsieur Mottard, je n’ai jamais fait de politique, je ne vous connais pas, mais j’aime la façon dont vous vous adressez à vos concitoyens et j’apprécie le programme et l’action de Nice Plurielle. J’aimerais m’engager à vos côtés ». Et d’insister sur le fait que cet engagement restera plus pratique qu’idéologique et que, de toute façon, il avait tout à apprendre en politique.

J’ai immédiatement été séduit par cette humilité et cette modestie. De fait, à partir de là, Antonin ne nous a plus jamais quittés, ne nous a jamais manqué.

Avec opiniâtreté, en autodidacte de la politique, ce citoyen actif a utilisé notre groupe et notre parti comme une sorte d’université populaire afin de devenir un citoyen engagé puis un militant, au sens noble du terme, et de s’intégrer parfaitement dans notre intellectuel collectif.

Et pour moi, le document que j’ai sous les yeux, par son enthousiasme et sa pertinence, illustre la réussite de ce parcours.

Notamment quand il prône la « démocratie d’amendements » comme étape intermédiaire entre la démocratie représentative et la démocratie participative. Une démocratie participative qui, selon lui, ne doit pas dénaturer la fonction de l’élu « qui doit rester le décisionnaire final, celui qui s’engage, prend le risque et l’assume… ». Mais aussi quand il prône ouverture et échanges, afin « de ne pas s’enfermer dans une identité nissarde antirépublicaine ».

Sans parler des nombreuses propositions programmatiques qui, n’en doutons pas, animeront les prochaines réunions de la permanence de l’avenue Cyrille Besset…

Que la démocratie serait belle, forte et vivante avec plus d’Antonin…

05 septembre 2006

Camille


Les travaux du tramway occasionnant de longs et pénibles déplacements en voiture, je positive en poursuivant mon exploration de ce que d’aucuns appellent « la nouvelle chanson française ».

Après Anaïs, je me suis intéressé aux dernières productions de ces nouvelles stars que sont Benabar, Raphaël et Camille.

Résultat des courses : nous sommes bien au-delà de la médiocrité ambiante, des lolitas staracadémisées aux Québécoises bêlantes.

Cela dit, modérément convaincus par les garçons, c’est l’univers envoûtant de Camille qui m’a surtout séduit, voire emballé.

Même si l’ensemble de l’album de Benabar est honorable, il reste minimaliste. Le chanteur semble hésiter entre l’anodin et l’anecdotique. Refuser d’aller dîner chez des amis (Le dîner) ou fustiger les sempiternelles photos de vacances qui envahissent buffets et commodes (Les épices du souk du Caire), ce n’est quand même pas le sommet de la révolte. A part une très belle chanson sur le temps qui passe (Quatre murs et un toit) et un coup de griffe un peu acide sur certains inconvénients de la paternité (La berceuse), l’ensemble de l’album est un peu convenu et la musique assez répétitive.

« Caravane », la dernière production de Raphaël, est plus imaginative même si parfois elle flirte un peu trop avec le politiquement correct. Là encore, une belle chanson sur le temps qui passe (Et dans 150 ans). Décidément, ces jeunes gens sont bien mélancoliques !! L’énigmatique Schengen est aussi à mettre au crédit d’un chanteur qui arrive à imposer une voix, voire un style, mais pas un univers.

Quant à Camille, c’est peu dire que, dès la première phrase du premier titre (La jeune fille aux cheveux blancs : « Je suis à l’âge où l’on ne dort nulle part »), on est immédiatement subjugué par cette voix étrange, qui change de registre constamment en imposant un univers mi-onirique mi-réaliste et, en tout cas, formidablement poétique.

La musique aux sonorités d’ailleurs renforce un climat de mystère et d’étrangeté. Un mystère et une étrangeté jamais fabriqués, jamais gratuits.

Baby carni bird est probablement le titre qui m’a le plus touché. On y raconte l’histoire d’une jeune femme victime d’un accident :
« La route était barrée
quand il m’a renversé
un soir au nord de Nice »
(Le conseiller général de Nice nord n’en veut absolument pas à Camille pour cette contre-publicité).

Ta douleur et Assise traitent avec poésie et humanité de grands sujets comme la maladie et le handicap sans jamais solliciter le compassionnel larmoyant.

En fait, chaque titre mérite un commentaire. Et si l’univers de Camille n’est pas exagérément optimiste – loin de là – (Pâle septembre), la demoiselle a quand même de l’humour. Janine, par exemple, nous entraîne irrésistiblement du côté de Boby Lapointe.

Au dos de l’album, Camille nous précise :
« J’ai coupé le fil
et je me suis enfuie
je cours après mon rêve : la ligne d’horizon ».

Heureusement, cette ligne d’horizon, Camille n’est pas près de l’atteindre. Pour notre plus grand plaisir.

03 septembre 2006

En attendant Godot

Petit à petit, le paysage de la campagne présidentielle se met en place. Surtout à droite.

Sarkozy, à peu près débarrassé de ses rivaux chiraquiens, a retrouvé le sourire et peut parader dans les universités d’été de l’UMP et du MEDEF entre deux évacuations musclées de squats. Le Pen, grand rassembleur de l’extrême droite, s’apprête à nous jouer le retour du fils prodigue façon Greuze en accordant son pardon au félon Mégret. Bayrou, il faut bien le reconnaître, nous fait une vraie campagne de centriste (sa reprise de volée gagnante contre Claire Chazal, la voix de son maître, hier au JT de TF1, à propos des liens entre l’UMP, les médias et les puissances d’argent, était un pur bonheur).

A gauche, par contre, la mise en place semble un peu plus laborieuse.

A la gauche de la gauche, les difficultés rencontrées pour faire émerger une candidature commune montrent que le ciment du non au referendum sur le TCE était bien friable et que, sous la Ve République, il est difficile pour une formation politique de renoncer à la tribune que représente la campagne présidentielle. Un autre monde est peut-être possible, mais sûrement avec une autre République.

Quant au PS, le moins que l’on puisse dire est qu’il a du retard à l’allumage. Un retard d’autant plus prévisible qu’il était programmé. Avec une langue de bois consensuelle et consternante, on n’a cessé de répéter (les présidentiables les premiers) qu’il fallait mettre les questions de personnes de côté et travailler… Alors que pour travailler efficacement, il fallait d’abord régler la question de personnes. Pour ma part, j’étais partisan d’une désignation dès le printemps qui aurait mis notre candidat(e) en position de force à la rentrée (Dominique, Laurent, Martine et les autres).

Certains ont fait semblant d’être déçus par l’Université d’été : c’était bien inutile car il n’y avait rien à en attendre, la désignation n’ayant toujours pas été faite. C’est ce que j’ai répondu aux journalistes qui s’étonnaient de mon absence à La Rochelle.

Notre choix se fera donc à la mi-novembre, et il sera bien tard. La Ve République aime les coureurs de fond (Pompidou, Mitterrand, Chirac) ; les sprinters peuvent faire une belle course, mais ils sont battus sur le fil (Poher en 1969, Jospin en 1995). Raison de plus pour choisir un candidat qui aura l’expérience nécessaire pour mener une campagne courte, pratiquement sans droit à l’erreur.

On peut toujours l’espérer.

02 septembre 2006

De Beyrouth à Téhéran

Parfois, on regrette d’avoir eu raison. Le 19 janvier, Alexandra Pope (voir Pope star), sur le plateau de Nice Télévision, m’a demandé quel était, selon moi, l’événement le plus marquant de la dernière année sur le plan international.

A sa grande surprise, j’avais répondu – et je me souviens ne pas avoir hésité – « l’accession de Mahmoud Ahmadinejad au pouvoir en Iran ». Et j’avais ajouté que ce n’était pas une bonne nouvelle.

Les événements de ces derniers jours confirment hélas mes craintes de janvier : la République Islamiste d’Iran n’hésite pas à défier l’ONU et un Conseil de sécurité pour une fois unanime, en poursuivant son programme nucléaire.

Certains font remarquer qu’après tout d’autres pays ont accédé au statut de puissance nucléaire sans pour autant déclancher l’ire de la communauté internationale. En fait, le cas de l’Iran est tout à fait spécifique dans la mesure où ce pays est porteur d’une idéologie agressive et explicitement destructrice à l’égard d’un Etat membre de l’ONU, en l’occurrence Israël. Sans parler de son modèle de société et du rôle de la femme dans celui-ci.

Ce défi du régime des ayatollahs et le moment choisi pour le lancer démontrent à l’évidence que la récente guerre du Liban n’était pas liée au conflit israélo-palestinien (d’ailleurs qui se soucie aujourd’hui des Palestiniens ?), mais constituait un test de l’Iran vis-à-vis des occidentaux et des pays arabes modérés (voir Kyriat Shemona).

Ne pas désarmer le Hezbollah, le laisser se parer des oripeaux du nationalisme libanais et lui permettre de devenir le fer de lance du monde arabe était et reste irresponsable. La solution bancale de la FINUL « renforcée », ne pouvait qu’encourager le puissant tuteur iranien de la milice chiite libanaise à lancer le défi nucléaire.

Le Hezbollah n’a que faire de l’unité du Liban ou de la question palestinienne. Sa fonction – et c’est pour cela qu’il est largement subventionné – est de tester la résistance anti-ayatollahs sur la ligne de front.

Ne pas le voir, ne pas le dire – c’est le cas d’une grande partie de l’opinion publique internationale et des médias (à l'exception de « Charlie Hebdo »; voir notamment le numéro de cette semaine) – relève d’une logique munichoise.

L’Iran aujourd’hui, la Corée du Nord, pourquoi pas, demain, d’abandons en petites lâchetés, un nouveau monde risque d’être assez rapidement possible. Ce sera celui du déséquilibre de la terreur.