29 août 2011

Parenthèse fraternelle à l’Ariane



Invité par l’association « Amitié judéo-musulmane » à l’Ariane pour le repas de rupture du jeûne du ramadan, j’avoue m’être posé la question de ma participation. Si l’individu Patrick Mottard ne pouvait qu’être sensible à l’invitation d’un groupe où il compte beaucoup d’amis souvent très proches, l’élu républicain pouvait s’interroger sur sa présence à une manifestation dont l’objet était tout de même directement religieux.

En réalité, j’ai opté assez rapidement pour la participation : en ces temps d’intolérance généralisée où la République elle-même est un peu fracassée, il ne faut pas bouder les lieux où l’on essaie de vivre ensemble. L’exaltation de la fraternité valait bien une messe… voire trois, puisque les trois religions du Livre étaient concernées par la soirée.

De fait, le débat introductif, présenté par le président Mohamed Fernane et animé par le rabin Joseph Abittan de la rue Michelet, l’iman Hadj et le prêtre Patrick Bruzzone, tous deux de l’Ariane, sur le thème du jeûne, fut révélateur de la volonté oecuménique des participants. Et même, pourrait-on dire, un peu plus que cela. En présentant le jeûne non comme une mortification du corps offerte à Dieu mais un moyen de libérer son esprit pour aller vers les autres, étape indispensable avant le divin (« c’est en passant par le prochain que je vais à Dieu »), les orateurs laissaient, peut-être inconsciemment, la porte ouverte à un jeûne philosophique à l’usage des athées. Dont acte.

Puis ce fut le repas forcément fraternel, la délicieuse soupe marocaine et les sublimes bricks tunisiennes.

Une planche, des agapes : même un franc-maçon y aurait retrouvé ses petits !

28 août 2011

Mon 28 dans le 5

Devant le Palais Stella

Non, je ne suis pas un devin.

Pourtant on pourrait aisément croire le contraire car programmer il y a de nombreuses semaines un retour des Etats-Unis par New York le 27 août dans un des derniers avions autorisés à décoller avant Irene peut apparaître comme relevant de l’art divinatoire. Il en est rien.

Comme tous les ans, je tenais absolument à être présent à Nice le 28 Août pour rendre hommage aux héros qui ont libéré notre ville en 1944. Une libération qui s’est décidée puis développée à partir de territoires appartenant au 5e canton.

C’est ainsi que, dès neuf heure du matin, je rejoins « le circuit de la mémoire » devant la stèle d’Alphonse Cornil, un résistant tué devant le 130 boulevard Gambetta. Le circuit de la mémoire est une initiative de Jean-Marc Giaume – aujourd’hui adjoint au maire – qui consiste le jour anniversaire à faire le tour des lieux rappelant que des hommes sont morts pour libérer Nice.

Après Gambetta, nous nous rendons tout près au 2, boulevard de Cessole, un endroit que je connais bien pour l’avoir décrit dans « Cinq de cœur ». Là, il s’agit de rendre hommage à cinq jeunes hommes qui ont donné leur vie pour que Nice ne soit pas détruite ou victime de représailles dans un contexte où l’armée américaine, pourtant proche, refusait de franchir le Var. Ils s’appelaient René Barralis, Lucien Chervin, Auguste Gouiran, Jean Ballestra et Roger Boyer (qui donna son nom au square de la Dominante).

Vers 11 heures, le circuit passe par la place de la Libération, plus précisément à l’angle de Raiberti, en mémoire d’Auguste Bogniot. Enfin, ma participation à cette belle manifestation s’achève au 24 boulevard de Cimiez, devant la villa Paradisio et la stèle d’Emile Krieger, un résistant dont on vient de reconstituer, il y a à peine quinze jours, grâce à des documents, les circonstances de la mort. C’est dire si mon émotion est forte quand je prononce le discours commémoratif qui les organisateurs ont eu la délicatesse de me confier.

A 16 heures, c’est au carrefour du 28 août, le fameux « Passage à niveau », à l’intersection de Gambetta et de Joseph Garnier, devant la pyramide en pierre qui tient lieu de monument aux morts, que la Mairie nous a donné rendez-vous afin d’honorer l' ensemble des combattants morts pendant la Libération de Nice. L’appel aux morts, lu par une dame âgée et ponctué par des « Mort pour la France », est toujours aussi émouvant.

A 18 heures, au même endroit, c’est le PCF qui organise une cérémonie de la mémoire. Ce n’est pas incongru car une grande partie du comité insurrectionnel et des résistants du 28 étaient communistes. La petite foule des militants est somme toute réconfortante pour ceux qui avaient participé à la cérémonie précédente où le public était quasiment inexistant.

Enfin, à 19 heures, c’est le musée de la Résistance qui organise, comme chaque année, autour d’une allocution pédagogique, un rassemblement devant le Palais Stella au 20 boulevard de Cessole, l’immeuble où se trouvait l’appartement où fut décidée l’insurrection, la veille du 28.

En présence d’amis très chers comme le Commandant Pietri ou Louis Fiori, Solange Rodrigues nous rappelle, non sans humour, que les Niçois se sont libérés seuls, devant des Américains si incrédules qu’ils ont envoyé des émissaires pour vérifier si la ville était bien libérée, avant d’accepter de participer au défilé de la Victoire.

Au final, une belle journée, même si j’ai pu vérifier cette année encore que le nombre de survivants de cette époque diminue régulièrement. Ce qui est triste sur le plan humain et dramatique à une époque où nous avons tant besoin de témoins.

C’est dire si pendant ces quelques heures, j’ai beaucoup pensé à Emile Corboli.

26 août 2011

Epilogue

Heureux qui comme Ulysse...



25 août 2011

Key West




CARNET DE VOYAGE N° 9

Après un petit clin d’œil à Bogart en passant du côté de Key Largo, nous arrivons à Key West, l’incontournable escapade dont je rêve depuis NYC, histoire d’enrichir le présent voyage de ces petits rendez-vous intimes que j’affectionne.

Celui, par exemple, avec la géographie en me rendant au « Southternmost point », le lieu les plus au sud des Etats-Unis. En effet, j’aime ces endroits dits « le plus ceci… le plus cela… ». Ils me permettent ensuite de rêver toute l’année devant les planisphères que je garde toujours à portée de regard. En 2010, nous avions atteint le point central de du côté de Vilnius, cette année ce sera donc à l’extrémité d’une rue de Key West, cette borne un peu voyante qui nous rappelle que nous ne sommes qu’à 90 miles de Cuba.

L’autre rendez-vous est celui qui me permet, au cours de chaque voyage d’été, d’emmagasiner assez d’énergie existentielle pour attaquer la rentrée avec force et passion. Cette année, ce sera la maison d’Ernest Hemingway, celle-là même où il vécut de 1928 à 1940 en écrivant sept de ses romans les plus célèbres comme « L’adieu aux armes » ou « Pour qui sonne le glas ». Il est vrai que j’apprécie l’écrivain… et le créateur du Bloody Mary, curieusement absent de la carte du Sloppy Joe’s … Mais c’est surtout l’intellectuel engagé, vraiment engagé, que j’admire.

Aussi, visiter cette maison somme toute modeste, de la cuisine au bureau où se trouve la machine à écrire qui l’a accompagné pendant la guerre d’Espagne, se recueillir quelques minutes dans le petit jardin noyé dans une végétation luxuriante au milieu des chats à six griffes, est non seulement émouvant mais vous donne aussi, tout simplement, l’envie d’être meilleur…

23 août 2011

En attendant Irene



CARNET DE VOYAGE N° 8

De Tallahassee, la capitale officielle de la Floride, à Miami, ce fut, en une seule journée, un voyage de plus de 800 kilomètres par des routes souvent rectilignes à travers marais et forêts aux arbres parfois parasités par cette mousse espagnole qui nous intrigue tant depuis notra arrivée dans le Sud.

Voyage un peu monotone avec quand même quelques surprises comme la traversée de la baie de Tampa sur le Skyway bridge, un des plus beaux ponts du monde (j’adore les ponts !) et du côté de… Naples, cet orage si violent qu’il nous fit oublier les précédents.

Mais l’impatience était grande de retrouver mon beau-frère et sa petite famille. En effet, Philippe et Marie ont su habilement jouer des opportunités créées par l’écroulement du marché immobilier aux Etats-Unis pour acquérir une magnifique résidence secondaire dans un beau quartier avec leurs seuls salaires. Au 18ème étage d’un immeuble qui domine Miami Beach, l’appartement est effectivement superbe et les retrouvailles familiales furent à la fois chaleureuses mais du coup un peu exotiques.

Quant à la ville elle-même, elle a beaucoup changé depuis notre dernier séjour… à la fin des années 1970. La vague latino-cubaine a transformé la cité en ville hispanisante tout en donnant un coup de jeune à ce qui était considéré comme une maison de retraite pour vieux riches. Les nouvelles constructions – nous avons pu le vérifier – respectent bien le parti pris Art déco qui est la marque architecturale de la ville. Et comme, bien sûr, elle a conservé son aspect de marina géante avec des langues d’océan un peu partout et son exceptionnelle luminosité (que l’on peut comparer à celle de la Côte d’Azur), elle est devenue une des cités les plus belles et les plus intéressantes d’Amérique.

Mais Miami est une ville tropicale, avec toutes les incertitudes météorologiques que cela comporte. Ainsi, depuis notre arrivée, tout le monde ici parle d’Irene. Non pas notre sympathique « Irène Autrement », mais Irene l’ouragan qui est actuellement en train de monter en puissance du côté de Porto Rico et d’Haïti. Il semblerait que l’Irène en question ait envie de faire un tour à Miami dans quelques jours. Espérons qu’elle change d’avis car il serait navrant que notre bon Forrest, qui a pu vérifier ce midi en déjeunant dans un Bubagump la popularité de la formule « Run Forrest, run », soit obligé de la troquer contre celle, nettement moins rassurante de «  Fly, Forrest, fly » !


Forrest sur la plage de Miami

21 août 2011

Boiled peanuts et Subway sandwich



CARNET DE VOYAGE N° 7

Un voyage est toujours la source de grandes émotions et de petites anecdotes, de moments rares et de sensations inédites. Ainsi pour la restauration de route, ces petits encas que l’on glane tout au long du chemin pour se sustenter et même se distraire. L’aventure est au bout du casse-croûte, le meilleur peut côtoyer le pire.

Le pire, nous l’avons connu cette après-midi quand, sur une route du nord-ouest de la Floride, quelques kilomètres après Niceville (et oui !), j’ai brutalement bifurqué sur un terre-plein où se trouvait une petite roulotte colorée sur laquelle on pouvait lire « Boiled peanuts ». Il faut dire que, mis en alerte par un guide touristique qui expliquait que ce met était une espèce de symbole des Etats du Sud, je guettais l’occasion. La patronne, sorte de Ma Dalton, eut la délicatesse de nous faire goûter la chose avant l’achat. Heureusement, car les cacahuètes bouillies sont purement et simplement une atteinte à la civilisation ! Comment une gourmandise aussi consensuelle – à part les allergiques, qui n’aime pas les arachides ? – peut-elle devenir cette chose gluante, douçâtre, tiédasse et limite nauséabonde ? Même moi qui ai pourtant l’estomac aventurier, je n’ai pas pu aller au-delà de la deuxième bouchée.

Du coup, sous l’œil goguenard de Ma Dalton, nous avons piteusement battu en retraite. Et de nous demander, pendant les 50 kilomètres qui ont suivi, si cette agression ne nous avait pas définitivement dégoûtés de la bonne vieille « cahouette » de l’apéro.

Le meilleur peut aussi arriver. Depuis quelques jours, nous avons pris l’habitude de nous arrêter chez les franchisés de la chaîne Subway spécialisée dans les sandwiches que les clients composent eux-mêmes. Dans la série Friends, il y a un épisode où Ross, l’intello de la bande, pique une crise de nerfs parce qu’on lui a volé son sandwich favori. J’avais trouvé cette scène un peu outrée. Ce n’est plus le cas depuis hier. En effet, dans un Subway entre Montgomery et Mobile, j’ai compris que le sandwich pouvait atteindre au sublime. Voilà ma combinaison : pain toasté, chorizo, cheddar, piments, poivrons verts, cornichons, oignons et une bonne couche de mayonnaise.

De quoi tutoyer le anges !

Bon appétit !

19 août 2011

Sweet home Alabama



CARNET DE VOYAGE N° 6

Montgomery est une ville tranquille lovée dans une courbe de la sage et majestueuse Alabama river. Il est bon d’y siroter un verre de vin californien en écoutant un chanteur folk-rock à la terrasse d’un café.

Dans les larges rues géométriques bordées de bâtiments officiels néo-grecs d’une blancheur éclatante et de buildings d’une hauteur raisonnable, la circulation est réduite, les passants rares et les touristes invisibles. Bref, elle a tout d’une belle endormie.

Pourtant, sur elle aussi, est passé le grand souffle de l’Histoire. A l’origine, les faits sont plutôt anecdotiques. Le 1er décembre 1955, une femme noire, Rosa Parks, refuse de céder sa place à un blanc dans un autobus de la ville. Arrêtée, elle sera condamnée à une amende, mais son geste, relayé par MLK (encore lui !), à l’époque jeune pasteur d’une église de la cité, sera à ‘origine du boycott par la population noire des bus de Montgomery et surtout l’élément déclencheur des mouvements pour les droits civiques qui embraseront l’Amérique des années 60. Du coup, assister à la reconstitution de la scène de l’arrestation au musée qui lui est consacré permet de penser avec émotion à cette femme courageuse et à cette période, pourtant peu éloignée, où la ségrégation subsistait dans le Sud du « grand pays de la Liberté ».

En fait, c’est tout l’Alabama qui fut le théâtre de cet affrontement que l’on voudrait final entre blancs réactionnaires et communauté noire. Nous avons pu le vérifier à Birmingham devant l’église baptiste de la 16e rue ou quatre fillettes et adolescentes ont été tuées par une bombe raciste (la meilleure amie d’une des victimes s’appelait… Condoleezza Rice).  A Selma aussi, sur le pont Edmund Pettus où dix-sept militants des droits civiques avaient été, en 1965, sauvagement blessés par les troupes d’un certain Georges Wallace, gouverneur de l’Etat.

Bien sûr, depuis cette époque, de l’eau est passée sous les ponts de Montgomery, de Selma et d’ailleurs. Il nous a même semblé surprendre un frisson de mixité sociale parcourant la ville. Il faut cependant raison garder car, sur une période aussi courte, l’effet « rousse de Calais » peut tout à fait déformer la réalité.

Le groupe Lynyrd Skynyrd avait créé une chanson – au milieu des années 70 – à la gloire des valeurs, souvent douteuses, du Deep south : Sweet home Alabama.

Souhaitons tout simplement que le titre de cette chanson, très populaire par ici, puisse être rapidement repris au premier degré par tous. Parions sur le progrès humain… et les deux mandants d’Obama !

Cela dit, s’il en est un qui n’a aucun doute sur la douceur de vivre en Alabama, c’est bien notre Forrest Gump. Personne, en effet, n’a oublié qu’il est né dans ce beau pays à 400 m de la départementale 17 et à 800 m de Greenbow, comté de Greenbow… C’est donc le cœur chargé d’émotion et les jambes en coton qu’il a zigzagué une petite demi-douzaine de kilomètres entre Dowtown et le Waterfront de Montgomery, Alabama.

Ce petit point bleu sur Commerce street, c’est Forrest, le régional de l’étape, bien sûr !

17 août 2011

Atlanta : America, America



CARNET DE VOYAGE N° 5

Atlanta ne figure probablement pas dans le top ten des villes américaines les plus connues. Pourtant, la capitale de la Géorgie est une petite Amérique à elle seule. C’est à la fois la cité de l’on voit brûler dans Autant en emporte le vent, la ville natale de Martin Luther King, le siège de ces deux symboles de la puissance américaine que sont Coca-Cola et CNN, et le site des Jeux Olympiques de 1996.

Compte tenu des préventions exprimées préalablement dans ces carnets de voyage, nous nous sommes contentés d’un passage rapide devant la maison de Margaret Mitchell. Par contre, nous nous sommes attardés dans le quartier où MLK, comme on l’appelle ici, a passé son enfance. Assis sous la véranda de sa modeste maison natale, j’avais l’impression, après le Lorraine de Memphis, il y a quelques années, et le « Dream » de Washington il y a quelques jours, d’achever ici un étrange voyage initiatique à rebours.

Dire que Coca-Cola présente, dans un style peu distancié « The (wonderful) world of Coca-Cola » est un doux euphémisme. Mais que voulez-vous, on ne pouvait pas attendre autre chose d’une institution qui croit si peu au Père Noël qu’elle l’a inventé… Cela dit, on ne pourra pas me reprocher de ne pas avoir joué le jeu : j’ai bu du coca japonais et rédigé, comme beaucoup de visiteurs, un petit texte pour expliquer dans quelles circonstances j’ai entendu parler pour la première fois de la célèbre boisson gazeuse. J’avais dix ans et une voisine aux revenus modestes de ma grand-mère offrait à ses invités, en guise d’apéritif, le divin élixir dans… des verres à porto !

Chez CNN, par contre, nous avons cru halluciner devant l’immense patio de l’immeuble de la chaîne qui abrite des dizaines de studios, des centaines de bureaux, autant de journalistes et,  mappemonde sur le gâteau, un immense globe terrestre. Si le symbole recherché est de montrer que la force de frappe des médias a transformé le monde en village, il faut reconnaître que l’effet est plutôt réussi. Et, même si nous n’avons pas résisté au plaisir de batifoler dans les prestigieux studios de la chaîne, Il faut reconnaître que ce gigantisme est un peu déstabilisant.

Quant à Atlanta, ville olympique, c’est bien sûr Forrest qui en a largement profité, en terminant son périple matinal par le Centennial Park des Jeux de 96. Cette euphorie athlétique ne l’empêchera pas de remarquer les dizaines de homeless croisés tout au long des douze kilomètres de son entraînement, ce qui n’était pas le cas dans les autres villes.

Mais l’instant le plus insolite, c’est à une vingtaine de miles du « Downtown » que nous allons le vivre. Sur un immense mégalithe presque digne d’Ayers rock (sorry John !), nous avons pu approcher à quelques mètres un magnifique faucon, attendant avec impatience son envol que l’on prévoyait majestueux. Ce fut effectivement le cas quand l’ombrageux rapace se décida enfin. Ainsi, après le pas suspendu de la cigogne l’an dernier en Europe de l’Est, se fut, cette après-midi, le vol attendu du faucon d’Atlanta…

Forrest dans Spring Street

14 août 2011

Calling you at Boykins

Le patron et le maire

CARNET DE VOYAGE N° 4

Newport News en Virginie, Charlotte en Caroline du Nord, Savannah en Géorgie : c’est en zigzag que nous progressons vers le Sud, mais nous progressons.

Entre les champs de coton et les plantations de tabac, avec Amy Winehouse comme compagne de route, les miles s’additionnent même si nous essuyons régulièrement des orages d’une intensité inouïe à côté desquels nos pluies méditerranéennes peuvent être assimilées aux brumisateurs de Paris-Plage.

Jour après jour, nous essayons autant que possible d’éviter les monotones Interstates. Il ne nous a pas échappé que nous étions dans le pays du bison et que, futé ou non, il fallait en profiter. Pour concocter ces fameux itinéraires bis, je fais évidemment davantage confiance à ma co-pilote qu’à la pimbêche du GPS qui ne rêve que d’une seule chose : nous faire bouffer de l’autoroute jusqu’à l’indigestion. La récompense est au bout de la recherche des chemins de traverse. Elle nous permet de vraiment pénétrer cette Amérique profonde qui nous intrigue, qui nous irrite, qui nous passionne et… que nous aimons.

De plus, ces itinéraires décalés nous permettent de partir à la recherche du mythe absolu : Bagdad café ! Eh bien, figurez-vous que notre Bagdad café nous l’avons trouvé quelque part à la limite de la Virginie et de la Caroline du Nord, dans un petit bourg qui s’appelle Boykins. Au Beans & Ice cream, tout y était : le couple de patrons avec ses rêves de France, le presque cow-boy, les workers du coin, le couple d’obèses, la retraitée à la Cadillac, et même Monsieur le maire, très digne qui, avant d’attaquer son hamburger a tenu à nous saluer. Bref, j’avais l’impression de communier avec un condensé d’humanité pour road movie à l’américaine. Finalement, il ne manquait que Jasmine et sa lourde valise. Qu’à cela ne tienne : « Calling you ! »


Dopé au « crabe cake » et à l’hummus de haricots blancs, Gump ramène sa fraise à Charlotte

12 août 2011

Holly-Wood vs. Hollywood



CARNET DE VOYAGE N° 3

A peine sorti de Washington sur la route n° 1 – joliment survolée par de nombreux aigles – vous avez très vite l’impression de pénétrer dans un monde nouveau. C’est que vous êtes déjà dans le Sud…

Rien de géographique ou de météorologique dans ce sentiment-là, il est avant tout historique. Les lieux-dits, les rues, les monuments, les devantures, tout vous rappelle que la Virginie était à la tête de la coalition des Confédérés pendant la guerre de Sécession. Du coup, vous cherchez à en savoir plus comme nous l’avons fait, par exemple, en visitant le cimetière de Holly-Wood à Richmond. Et là, devant les tombes des 17 000 soldats confédérés, vous prenez une grosse baffe. Hollywood, l’autre, celui des films, nous a trop souvent présenté cette guerre comme le baroud d’honneur d’élégants esclavagistes buveurs de thé glacé qui ne voulaient pas se soumettre à la rationalité du Nord. En fait, la guerre de Sécession fut bien plus que cela car ce fut une vraie guerre civile. Et nous autres, Européens, savons depuis l’Espagne et la Yougoslavie la cruauté de ces guerres-là.

Alors, comment ne pas penser, en cheminant devant les petites stèles blanches souvent accompagnées d’un drapeau parfaitement entretenu aux couleurs de la Confédération, que cette guerre a provoqué 620 000 morts, c’est-à-dire plus que toutes les pertes américaines pendant les deux guerres mondiales et du Vietnam réunies. Rapportée à la population actuelle, la saignée aurait été de 6 millions d’Américains.

Heureusement, le cinéma ne brouille pas toujours notre sens de l’Histoire. J’en veux pour preuve la promenade effectuée au bord de la James river à l’endroit où, en 1607, John Smith installa la première colonie anglaise en terre américaine avant de vivre une belle et tragique histoire avec Pocahontas, la princesse indienne.

Tout en évoluant dans ces paysages de premier matin de l’Amérique, j’avais en effet l’impression de me mouvoir dans les décors et de respirer l’atmosphère du film de Terence Malik, « Le Nouveau Monde ». Ainsi, ce film n’est pas seulement une enthousiasmante réussite esthétique, poétique, philosophique, mais aussi une impeccable reconstitution historique. Qu’on se le dise. Grâce à lui, d’ailleurs, il me semble bien avoir entendu le rire de Pocahontas, là-bas, au fond de la forêt…


Forrest aurait été surpris dans une piscine de Virginie en train de préparer un triathlon… Apparemment, ce n’est pas gagné !

10 août 2011

Franklin Delano, Martin Luther et Barack Hussein


Photos DBM

CARNET DE VOYAGE N° 2

C’est après 250 miles moroses – highways surchargées et orages carabinés – que nous sommes arrivés à Washington, deuxième étape de notre périple.

J’aime la capitale fédérale car, à l’instar de Paris ou de Moscou, c’est une ville où souffle le grand vent de l’Histoire. D’Arlington au Mall, cette belle ville horizontale, à la fois solennelle et modeste, déroule devant le visiteur le fil brisé de l’Histoire américaine, des Pères fondateurs au 11 septembre (le Pentagone avait été visé) en passant par la saga Kennedy ou le Watergate.

Ainsi, pendant ce court séjour, trois lieux de la ville m’ont plongé dans cette intimité virtuelle si intense que l’on ressent parfois vis-à-vis de personnages historiques admirés.

Le premier frisson, je l’ai éprouvé au bord du Tidal Basin, au milieu du chaos de granit rouge et de cascades sages qui tiennent lieu de mémorial à Franklin Delano Roosevelt. De nombreux bas-reliefs reprennent les discours de celui qui fut Président de 1933 à 1945. C’est ainsi que l’on retrouve avec émotion l’inventeur du New Deal, le croisé de la paix sociale, mais aussi le chef de guerre, sans oublier l’infirme. Une statue nous le rend pour l’éternité sur sa petite chaise à roulettes de paralytique qui jamais ne le quittait. A le voir ainsi, si fragile et si fort, je n’ai jamais eu autant l’impression de comprendre aussi bien et l’homme et le Président.

Le deuxième lieu est plus exposé. A l’entrée du monument dédié à Abraham Lincoln, sur une dalle, est inscrite la formule célèbre « I have a dream ». C’est ici, en effet, qu’en 1963 Martin Luther King prononça devant 200 000 personnes son célèbre discours contre la ségrégation. Mais malgré la foule joyeuse qui photographie le petit carré de marbre, je ne peux m’empêcher de penser au balcon étroit du motel « Lorraine » de Memphis sur lequel nous nous tenions il y a tout juste trois ans . Deux lieux, un destin, mais, de Pretoria à Montgomery, une petite phrase qui a fait son chemin.

Le troisième endroit est incontournable à Washington : il s’agit de la Maison Blanche. Ce n’est pas ma première visite mais cette année je n’arrive pas à croire que son actuel locataire est un certain Barack Obama, cet homme dont nous avons tellement souhaité la victoire. Bien sûr, je ne sais pas si Obama sera considéré comme un grand Président par le tribunal de l’Histoire, je ne sais même pas s’il sera réélu. Mais tel quel, le symbole de sa présence ici, à la Maison Blanche, est une victoire de l’humanisme : c’est un peu comme si le rêve de Luther King était devenu réalité. Cette certitude, n’en déplaise aux pisse-froid, je la puise ce soir dans le regard de fierté retenue de ces femmes et de ces hommes noirs qui, en ce dimanche d’aoput 2011 se font photographier devant la résidence d’un des leurs.

Quant à Gump, tout va bien pour lui. Profitant de son séjour à Washington, il a tourné autour du Mall avec la régularité d’un Gordon Cooper de l’asphalte tout en s’autocélébrant : l’espace situé entre le Capitole et le mémorial Lincoln est en effet le théâtre d’une des scènes mythiques de son propre film…

Avec son maillot rouge "Marathon de Nice", Forrest fait son intéressant devant le Capitole !

07 août 2011

New York city, fifth canton



CARNET DE VOYAGE N°1

J’ai toujours regretté la brutalité des voyages en avion qui, en quelques heures, vous projettent dans une contrée et un univers nouveau, quand la démarche initiatique guidant tout voyageur digne de ce nom exigerait un minimum de progressivité. C’est dire si cette année, en combinant transition culturelle et voyage en avion, j’ai le sentiment que notre périple estival a bien commencé. Comment cela ? Tout simplement en acceptant l’invitation à dîner d’une honorable citoyenne du 5e canton qui vit une grande partie de l’année à Manhattan. Si l’on ajoute que cette dame est Ultraviolet, l’artiste qui fut le modèle de Dali avant d’être une des stars incontestées de la Factory d’Andy Warhol, l’on comprendra que c’est sans hésitation que nous avons bravé les effets du décalage horaire. C’est ainsi qu’en contemplant de la terrasse de l’appartement d’Isabelle (c’est son véritable prénom) dans l’Upper East side le coucher de soleil sur Central Park et la spirale du musée Guggenheim, nous avons parlé de l’extension de l’Intermarché de la rue Clément Roassal et du devenir de la Gare du Sud et passé une soirée délicieusement… décalée.

N’en déplaise à Andy Warhol, l’ami de notre hôtesse, qui a dit un jour « J’aime être la bonne personne au mauvais endroit et la mauvaise personne au bon endroit », nous avons eu le sentiment très fort, en voyant les derniers rayons de soleil tomber dans les eaux argentées du Réservoir Jackie Kennedy-Onasis, que nous étions les bonnes personnes au bon endroit.

Quant à Forrest, c’est d’humeur joyeuse qu’il a entamé sa campagne américaine, par un raid à travers Manhattan qu’il s’est amusé à comparer à celui mené il y a une quinzaine de jours à Paris : la 5e avenue avait remplacé les Champs Elysées, the Pound, le lac du Bois de Boulogne, un petit écureuil, le lapin au derrière blanc, et l’hommage cinématographique n’était bien sûr plus destiné à Maria mais à Dustin, celui de Marathon man courant autour du Réservoir. Encore lui.

Forrest dans la 45th street

03 août 2011

La cithare au Carlone

Une heure et demie d'entretien au Pub Carlone près de la Faculté des Lettres avec Pascal Gaymard à propos de la publication de Sur un air de cithare cela donne, dans le Petit Niçois : "Patrick Mottard, l'éternel mélancolique". A vous de juger !