
2008 : dans un contexte de vague rose inégalé, 33% et plus de 10 000 voix d’écart avec la liste victorieuse.
2001 : dans un contexte défavorable pour la gauche, 41% et 3500 voix d’écart avec la liste victorieuse.
La messe est dite.
Et j’accuse.
J’accuse Patrick Allemand d’avoir délibérément sacrifié une chance historique de victoire pour la gauche à Nice.
Bien sûr il n’est pas seul.
J’accuse aussi tous les alimentaires qui ont préféré privilégier leur job d’apparatchik ou leur mandat indemnitaire à l’intérêt général, les mercenaires recrutés (ils se reconnaîtront) tout exprès pour détruire et faire mal, les subventionnés qui n’ont pas osé défier l’omerta, les ventres mous qui, en privé, s’affirmaient scandalisés par la démarche du Premier secrétaire pour mieux se coucher au moment du choix.
Mais quand même, cette défaite en rase campagne, ce changement d’ère qui vire au retour à l’ère glaciaire des années Cuturello, c’est à lui, le Vice-Président de la Région, le conseiller général, le Premier secrétaire fédéral, et maintenant conseiller municipal que nous le devons.
Démonstration.
Pour que la gauche gagne à Nice, il existait bel et bien un scénario idéal. En fait, ce scénario idéal n’exigeait pas de grands efforts car il nous était servi sur un plateau par la conjonction assez rare d’une rencontre avec l’opinion, d’une situation locale et d’un contexte national favorable.
Mars 2001 : notre liste a failli l’emporter. Même si Patrick Allemand a rappelé avec élégance maintes et maintes fois qu’il s’agissait d’une défaite, elle était pour le moins porteuse d’espoir. Tant et si bien qu’au Conseil municipal, le groupe et son président étaient plus considérés comme un contre-pouvoir que comme une opposition. Dans la foulée s’en sont suivies les victoires de 2001 dans le 1er canton, celles de 2004 aux cantonales et aux régionales, celle de 2005 dans le 7e canton. C’est à ce moment-là qu’il fallait me confier la mission de conduire la future liste, solution qui, à l’époque, paraissait une évidence pour tous les Niçois qui souhaitaient un changement. Cette reconnaissance de mon camp m’aurait permis d’aller au-delà du socle de la gauche, en crédibilisant notre candidature auprès des milieux de l’économie, du tourisme, du BTP, des comités de quartiers. Nous aurions eu trois années pour démontrer qu’un projet rassembleur proposé par une équipe de gauche pouvait être un choix pour Nice et les Niçois. Cerise sur le gâteau, un contexte national inattendu, lié à l’explosion en vol du Président de la République, nous aurait permis, comme partout en France, de renforcer cette stratégie. La victoire ne devenait pas une certitude mais une forte probabilité. Elle aurait été celle de tous et chacun aurait pu trouver sa place pour construire cette ville nouvelle que nous appelions de nos vœux.
Au lieu de cela, après avoir rongé son frein, Patrick Allemand estime au contraire que les régionales de 2004 lui permettent de lancer une OPA sur la candidature. Sur le fond, cette idée est fausse. Une analyse un peu sérieuse des résultats de 2004 montre que le succès aux régionales est dû avant tout au contexte national. Par contre, le résultat des cantonales niçoises démontre que deux candidats – et seulement deux – ont une équation personnelle, avec un score supérieur de plusieurs centaines de voix à la liste Vauzelle : Patrick Mottard (5e canton) et… Dominique Boy-Mottard (7e canton).
Sur la forme, cette candidature est détestable. Elle s’exprime dans un article de Nice-Matin dès septembre 2004 (trois ans et demi avant l’échénce…) en des termes scandaleux : je suis accusé d’avoir fait perdre la gauche en 2001… et de ne pas être Niçois de naissance…
A partir de là, alors que nous nous battons pied à pied au Conseil municipal avec Jean-François Knecht, nous devons subir une guérilla interne de la part de l’appareil fédéral qui nous reproche, notamment, une opposition trop frontale avec le Maire (on critique, par exemple, le fait d’avoir porté la plainte qui déclenchera pourtant l’affaire Monleau). Jean-François Knecht paiera d’ailleurs sa collaboration avec moi en étant débarqué, sans ménagements, de la présidence de l’association des Elus Socialistes des Alpes-Maritimes.
Mais comme cette entreprise de démolition est probablement trop lente, on passe à la vitesse supérieure par l’accomplissement d’une ignominie : il s’agit de m’accuser de discrimination sur une demi page de Nice-Matin (encore !). M’accuser de racisme était tellement invraisemblable que cette attaque est revenue en boomerang contre son initiateur. Reconnaissons toutefois que ce n’était pas la meilleure façon de faire parler de nous.
Sans cesse sur la défensive en interne, nous avons continué à assumer notre rôle d’opposants efficaces et déterminés. Mais accaparé par ce double combat, il ne nous restait plus beaucoup de temps pour aller de l’avant et légitimer une candidature qui, de certaine, était devenue potentielle. Parallèlement, il fallait aussi faire face à l’union sacrée des clientélismes. A celui de la droite s’ajoutait celui de la gauche et il devînt de plus en plus difficile de soutenir publiquement Patrick Mottard quand on touchait des subventions des uns ou des autres.
A partir de là, tout était joué.
Le candidat officiel des appareils ne dépasserait pas les 35%, socle traditionnel de la gauche à Nice. On pouvait présenter comme tête de liste une huître ou un raton laveur que le résultat serait le même. Et l’idée saugrenue de faire une campagne bling bling, au moins cinq fois plus coûteuse que celle de Nice Autrement n’y changera rien.
Devant ce gâchis programmé, avec de nombreux amis, j’ai préféré oser faire de la politique autrement, semer quelques graines de citoyenneté, faire aux Niçois une offre politique différente. Malgré les exclusions, malgré la sottise incommensurable du refus de la main tendue au soir du premier tour, nous avons continué à tracer notre sillon.
Cela dit, ne vous inquiétez pas. Après quelques heures de déception, Patrick Allemand vous expliquera comme aux législatives que sa défaite est une victoire. Ses colistiers applaudiront, mais regardez bien la photo. Vous distinguerez probablement deux ou trois sourires socialistes équivoques appartenant à ceux qui aiguisent déjà les couteaux pour être les premiers à renverser Allemand et avoir l’honneur de mener la liste qui fera 30% au deuxième tour en 2014. S’il y a un deuxième tour.
A moins que…
Ce à moins que, je vous promets qu’avec tous les amis de Nice Autrement, nous allons y travailler. Pour Nice et les Niçois.
Voir également l'analyse de Dominique.