07 mars 2010

Ni d'Eve ni d'Adam

 
Marie-Joseph Bertini
La célébration de la journée de la femme s'est petit à petit étendue et nous pouvons désormais parler de la semaine de la femme. C'est ainsi que, dès jeudi, je participais au lancement de "Femmes en scène", huit jours d'événements culturels au théâtre de la Tour Gorbella, aux côtés de la chanteuse Elisabeth Vidal, marraine de l'édition 2010.

Dès le lendemain, c'est à la permanence du 10 avenue Cyrille Besset que nous avons célébré, par anticipation et à notre manière - autrement - le 8 mars. En effet, à côté des nombreux rendez-vous festifs et des défilés revendicatifs (pas toujours bien ciblés : voir, sur ce sujet, le blog de Dominique "8 mars 2010 : quels droits pour les femmes ?"), il nous a semblé utile d'avoir une réflexion de fond sur la place des femmes (mais aussi des hommes, c'est l'évidence !) dans la société.

Nous l'avons fait avec Marie-Joseph Bertini, ma collègue et amie, qui vient de sortir un livre à la fois rigoureux et iconoclaste intitulé "Ni d'Eve ni d'Adam" et sous-titré encore plus explicitement "Défaire la différence des sexes". Peut-être stimulés par le souvenir d'une précédente intervention de l'auteur en 2002 au 3 avenue Cyrille Besset pour les plus anciens et la polémique autour du livre d'Elisabeth Badinter pour tous, les participants étaient nombreux, très nombreux.

Une question fondamentale justifie l'ouvrage : à quoi sert la différence des sexes ? A maintenir un ordre symbolique qui possède un coût que les femmes ont toujours payé, répond Marie-Joseph. Cette construction symbolique est confortée par les courants dominants des sciences humaines ce qui, du coup, justifie et renforce l'inégalité des sexes. C'est ce cercle infernal qu'il faut briser pour avoir une chance, un jour, de devenir tous, femmes comme hommes, co-créateurs de notre société.

L'intervenante fut à la fois pédagogue et brillante. Sa façon de passer certaines icônes à la moulinette est particulièrement réjouissante (pauvre Lévi-Strauss !). Et la salle fut, à la grande fierté de l'organisateur, à l'unisson. Des interrogations de la chercheuse Clotilde sur la psychanalyse aux expériences dans le monde du travail de l'ouvrier syndicaliste Emile, des réflexions sur les sociétés matriarcales de la mathématicienne Francine au vécu de mère de famille du cadre de la fonction publique Marie-Jo, des informations de la spécialiste des marchés financiers Anik à l'évocation de la "galanterie" par notre boulanger Jean-Claude, c'est tout un petit monde qui alimenta le débat pendant presque deux heures. Sans oublier l'intervention de notre Pic de la Mirandole, Henri.

Après le rosé ou le jus d'orange de l'amitié, chacun rentra chez soi, un peu ébranlé par les perspectives vertigineuses ouvertes par l'ouvrage de Marie-Joseph Bertini mais aussi plus riche. Avec peut-être en tête la réflexion de Georges Steiner qui figure en bonne place dans le livre : "que ce serait-il passé si le point de départ de la psychanalyse avait été Antigone et non pas Oedipe ?"

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