27 mai 2006

Pour un flirt avec toi…



Quand j'étais chanteur




CANNES (suite)

Entre les copies à corriger, mon cent onzième mariage, l’hommage à Jean Moulin (villa Thiole), et l’apéro de la permanence, la fin de semaine est bien occupée. Mais grâce à une bonne organisation, j’arrive quand même à sauver trois films sur Cannes.


Quand j’étais chanteur, de Xavier Giannoli (France)


Une bonne surprise avec ce film sans prétention, mais pas sans ambition. Alain (Gérard Depardieu retrouvé) rencontre Marion (Cécile de France épatante) : il est chanteur de bal et tombe amoureux de cette jeune divorcée pas tout à fait indifférente à ce gros nounours généreux et rassurant qui débarque dans sa vie. Malgré la différence d’âge et de milieu, cette histoire d’amour-amitié reste crédible jusqu’à sa double fin, une pessimiste, une optimiste. En effet, le réalisateur renoue avec une pratique courante à l’époque de Duvivier et de Renoir, la différence essentielle est que Giannoli nous propose ces deux fins à la suite l’une de l’autre : au spectateur de faire son choix. Mais pour moi, ce film est surtout une sorte de réhabilitation d’un personnage souvent maltraité par notre cinéma : le chanteur populaire. Lui qui, si souvent, est victime de procès en sorcellerie pour ringardise, apporte tout simplement, de bals de quartier en mariages, un peu de bonheur à ses contemporains. Quand Alain attaque «Pour un flirt avec toi» ou roucoule «Vous les femmes», c’est à ces artistes anonymes, modestes et dignes qu’on pense. En fredonnant avec lui ces refrains populaires, c’est un peu comme si on retrouvait, dans ce monde si sophistiqué du Festival, le temps de l’innocence.


United 93, de Paul Greengrass (USA)

Un film document sur l’histoire du Boeing 757 de l’United airlines qui s’est scratché le 11 septembre 2001 en Pennsylvanie, à la suite de la révolte des passagers qui avaient compris, via leurs téléphones portables, qu’ils allaient être transformés en arme fatale contre la Maison blanche. L’histoire se passe quasiment en temps réel et l’on a parfois l’impression d’être dans un épisode de 24 heures chrono. Bien sûr, ici, jamais Jack Bauer n’arrivera. Sur la forme, le film montre sans jamais démontrer. C’est sa force. Sur le fond, nous sommes consternés par l’impréparation des Etats-Unis face à une attaque terroriste pourtant prévisible. Nous sommes aussi émus par la force de caractère de cette poignée de passagers qui n’ont pas voulu mourir en otages.


El laberinto del fauno (Le labyrinthe de Pan) de Gullermo del Toro (Espagne)

L’OCNI (Objet Cinématographique Non Identifié) de ce Festival, une sorte de conte de fées sur fond de guerre civile espagnole. Les pérégrinations d’Ofelia, la petite fille qui se voit imposer par sa mère un beau-père odieux et sadique, c’est l’histoire de la petite sœur d’Harry Potter chez les Moldus franquistes. Les monstres qui peuplent l’imaginaire de l’héroïne ignorent avec dédain les effets spéciaux qui envahissent désormais nos écrans. Ils nous rappellent plutôt les créatures qui, dans les années cinquante, se trouvaient dans les films d’aventure qui passaient dans les cinémas de quartier. C’est parfois kitch, c’est souvent poétique (une mention spéciale pour le monstre qui a les yeux encastrés dans les paumes de ses mains… un amour !!). Et puis, à la fin, les partisans républicains ratatinent les franquistes. Il paraît que ce n’est pas tout à fait historique, mais ça fait du bien. Surtout en fin de Festival.


Justement, à propos de fin de Festival, le temps des pronostics est venu. Sans rentrer dans les subtils équilibres politico-artistiques qui président à la confection de tout palmarès à Cannes, je me contenterai de donner mon tiercé :

1- Volver, car Almodovar mérite de figurer au palmarès de Cannes. Deux fois Bill August et jamais Almodovar, ça fait un peu désordre.

2- Flandres, parce que je suis un inconditionnel de Dumont depuis L’Humanité et qu’un festival populaire peut aussi récompenser des films exigeants.

3- Summer palace, ce film chinois émouvant et résolument moderne, peut-être la vraie révélation de ce festival.

Cela dit, Les lumières du faubourg et La raison du plus faible, ce n’était pas mal non plus.

Pour Michel le Marseillais, le tiercé commence aussi par Volver, mais se poursuit avec Babel et Le vent se lève.

Pour Dominique, Almodovar est aux abonnés absents et laisse sa place à Summer palace, Flandres et Indigènes (mais Nanni Moretti et Il caimano, c’est aussi un grand moment).

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