Au-delà des collines
Comme chaque année à la même époque, j’essaie de trouver un
bon compromis entre les films de Cannes et les corrections de copies d’examen à
Nice. Celui-ci m’a tout de même permis de voir les quatre films qui lancent
véritablement l’édition 2012 du Festival avec, en prime, un dessin animé HC.
Reality, Matteo Garrone (Italie)
Luciano est un chef de famille napolitain exubérant et
populaire dans son quartier qui participe au casting d’une émission de
téléréalité. Du coup, sa sélection éventuelle devient une véritable obsession
qui va bouleverser sa vie et celle de ses proches.
La première heure du film de Matteo Garrone (Gomorra) est
une véritable résurrection de la comédie sociale à l’italienne avec personnages
picaresques, misère surmontée et joie de vivre. Hélas ! la deuxième heure,
qui voit le héros sombrer dans une sorte de névrose, est moins convaincante, et
le scénario donne l’impression de s’effilocher.
Madagascar 3, film d’animation HC (USA)
C’est désormais incontournable : Cannes paie chaque
année son tribut à la culture mainstream en invitant un blockbuster
hollywoodien en échange de la présence de quelques stars supplémentaires sur la
Croisette. Cette année, c’était le film d’animation 3D, Madagascar 3. Pas
grand-chose à dire si ce n’est que je trouve le graphisme des dessins animés
modernes assez moche et leur dimension émotionnelle assez pauvre.
Paradis : Amour, Ulrich Seidl (Autriche)
Dans un village du Kenya, des européennes quinquagénaires
plutôt abîmées dans leur corps et dans leur vie, viennent se consoler auprès de
jeunes Africains qui assurent ainsi leur subsistance et celle de leur famille.
En clair, il s’agit de tourisme sexuel, et que, pour une fois, on ait affaire à
des prédatrices plutôt qu’à des prédateurs ne change pas la donne. Le tourisme
sexuel est une métaphore particulièrement juste des rapports entre le Nord et
le Sud. Librement exposés pendant les deux heures du film, le moins que l’on
puisse dire est que ces rapports sont d’une infinie tristesse. Pour les deux
parties.
Au premier degré, le film pose tout simplement la question
de savoir si le tourisme dans les pays du Sud est possible. Je suis loin d’en
être certain.
Lawless, John Hillcoat (USA)
Lawless, c’est un peu Fantasia chez les ploucs à l’époque de
la Prohibition. Dans une petite ville de Virginie, les indestructibles frères
Bondurant trafiquent et résistent aux assauts des autorités corrompues. Ce film
esthétiquement réussi est extrêmement violent. Une violence qui rappelle la
vanité de toute prohibition. Jean-Michel Baylet n’avait peut-être pas tort
pendant les primaires à propos du cannabis…
Au-delà des collines, Cristian Mungiu (Roumanie)
Probablement LE film de ce début de festival. Alina revient
d’exil pour retrouver Voichita, son amie d’orphelinat. une amie qu’elle aime
d’un amour absolu bien que platonique. Hélas, cette dernière a rencontré Dieu
et vit désormais dans un couvent. Avoir Dieu comme rival est bien difficile. du
coup, Voichita d’abord, puis l’ensemble de la communauté religieuse vont
s’allarmer de la force de cet amour et y voir une manifestation du Malin. Aux
crises de désepoir de l’amoureuse vont donc correspondre des séances
d’exorcisme de plus en plus douloureuses et dangereuses.
En 2007, Mungiu nous avait émus et avait remporté la Palme
d’Or avec l’histoire d’Otilia et Gabita dans 4 mois, 3 semaines, 2 jours (voir
mon billet du 17 mai 2007). Aujourd’hui, il récidive avec l’histoire d’un autre
couple de jeunes femmes victimes de l’oppression (en 2007, c’était le régime communiste,
en 2012, c’est l’église orthodoxe…)
Mais, au-delà d’un réquisitoire impitoyable contre
l’obscurantisme, Au-delà des collines reste une belle initiation aux mystères
de cette maladie d’amour dont on se souvient, grâce à la chanson, « qu’elle
court… qu’elle court ! »
Du coup, la standing ovation réservée à Mungiu et à ses
interprètes à la fin du film était profondément justifiée.
8 commentaires:
Pas sympa avec le graphisme des dessins animés "modernes"... C'est très vif il faut juste apprendre à entrer dans l'univers des enfants "d'aujoud'hui" bien plus joyeux et optimiste que celui des adultes et ça fait énormément de bien aux adultes blasés !
Pépito
Il n'en demeure pas moins que je trouve ce graphisme plutôt moche...
C'est subjectif... Et puis sachez que ce sont des images synthèses ce n'est même pas du graphisme ! et si c'est moche quand même eh bien c'est parce que c'est le reflet de la société..."moderne" !!!
Pépito
Enfin un film italien, c'est pas trop tot.
Forza Nanni!
...et par image de synthèse j'entends infographie ou graphisme numérique.
Pépito
Pour l'initiation aux dessins animés d'aujourd'hui, je ne conseillerai pas Madagascar... mais, Le général, le chien et les oiseaux/ Ponyo sur la falaise/ Kérity et la maison des contes (en dvd).
J'attends le film Roumain avec impatience.
Un oubli dans la liste non exhaustive mais plus difficile à trouver et complètement loufoque: Pic-Pic le cochon magique.
Ce festival va beaucoup trop vite! Pas moyen de tourner le dos cinq minutes sans avoir une quinzaine de compte-rendus de retard!
Non que ces aperçus personnalisés ne soient bien agréables à lire, mais il faut bien enrager de temps en temps: ça permet de caser de petites demandes de dédommagement. La mienne serait le commentaire d'un film un tant soit peu réjouissant d'ici la fin du festival -si tant est qu'on en projette un. C'est le printemps après tout!
Sinon tant pis: je me rabattrai comme souvent sur l'Italie, et tant pis pour la 2e heure.
Pour ce qui est de Madagascar, chacun fait ce qu'il veut mais si on m'avait demandé... Enfin, trop tard.
Reste que ce style ne résume heureusement pas les dessins animés "modernes": s'il en faut pour tous les goûts, l'amateur d'esthétisme graphique et de dimension émotionnelle aurait en effet toutes les chances de rester sur sa faim.
Pour le contenter, je ne saurais trop appuyer la proposition de Ponyo -plus généralement, l'excellente production du studio Ghibli est toute indiquée.
Bien sûr, il faudra écrire un billet ensuite.
En attendant, je vais me mettre à jour sur les derniers: peut-être mon souhait de saison est-il déjà exaucé?
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