24 janvier 2010

5.14 - Béatrix




Le bureau a pris curieusement le nom de la minuscule impasse Béatrix – du nom de la fille d’un roi du Portugal qui épousa en 1521 le Duc de Savoie – îlot de tranquillité entre Borriglione et Théodore de Banville.

Le 5.14 regroupe notamment la rue Cavendish si pentue qu’elle ressemble à un tremplin de saut à ski, la rue Xavier et Joseph De Maistre, deux frères écrivains et voyageurs niçois de la fin du XVIIIe siècle et la malheureuse rue Theuriet martyrisée au fil des ans par les urbanistes de la ville qui l’ont découpé en quatre tronçons en mal d’alignements. Mais le secteur comprend les parties basses du boulevard Auguste Raynaud et de l’avenue Borriglione. En ce qui concerne le premier, je me souviens avec une certaine tendresse – au 5 et au 15 – de deux restaurants aujourd’hui fermés et que j’ai assidûment fréquenté : La torche et La calèche.

Renée, la patronne du second était, par le plus grand des hasards, originaire du même village de Saône et Loire que moi : Cruzille, dans le Mâconnais. Aussi, elle ne manquait jamais une occasion de rappeler qu’elle m’avait connu en culottes courtes… ce qui était à la fois l’exacte vérité et une révélation plus ou moins incongrue en fonction du degré de proximité qui me liait aux personnes qui m’accompagnaient.
La Torche, quant à elle, est associée à un épisode émouvant de ma vie. C’est ici, qu’autour d’une pizza, un jour de printemps en 1999, j’ai demandé à Michèle Mangion de m’accompagner dans l’aventure des municipales. Elle avait fini par accepter, plus par amitié que par ambition, et devint pendant cinq ans une conseillère municipale disponible et enthousiaste avant d’être emportée par une de ces maladies que l’on dit terrible qui ne lui permettra pas de terminer son mandat.


 Quant à la partie basse de Borriglione, elle a bien failli m’offrir un aller direct pour le paradis ou l’enfer (en la matière on n’a jamais de certitude…). Une belle matinée d’été, au début des années 2000, sac sur l’épaule et ritournelle aux lèvres, j’allais gaiement à la plage quand, en passant devant l’immeuble qui fait le coin Libération-Borriglione, le fameux « 6-8 » à dômes, un morceau du balcon se détacha de la façade particulièrement délabrée à l’époque, pour me frôler avant de s’écraser à mes pieds. La pierre, de la taille d’un gros pavé, aurait pu, à quelques dizaines de centimètres près, provoquer une élection cantonale partielle…

Un promeneur victime d’une telle négligence aurait probablement porté plainte contre la municipalité propriétaire de l’immeuble en question. Et, même si j’avais fait de nombreuses interventions au conseil municipal, j’ai estimé qu’il aurait été déplacé d’avoir une telle réaction. Je me suis donc contenté de prévenir le cabinet du maire pour que la façade soit purgée. Ce qui fut fait. Restera une belle émotion, quelques considérations métaphysiques sur la fragilité de la condition humaine et un bel article de Philippe Fiametti dans Nice-Matin me présentant comme un miraculé !

5 commentaires:

Claudio a dit…

Tremplin de saut à ski pour la rue Cavendish ? C'est exactement ce à quoi j'ai pensé la première que je l'ai vue.

cléo a dit…

L'alternative: se rabattre à la dernière minute en ville pour éviter ce qui tombe du ciel sans être.../ Recevoir postérieurement d'une partie de la terre le titre de campagne :" le miraculé de cruzilles" n'arrive pas tous les jours. Quand on en prend connaissance le lundi dans la morosité ambiante, c'est une vraie joie. Un regret peut-être: celui d'avoir échappé au témoignage portant sur les culottes courtes. Ne reste t-il pas des documents d'une autre nature pouvant être confrontés à ce témoignage?

Dominique a dit…

Cléo, il y a bien des photos....

alaind a dit…

A toi qui m'a connu en culottes courtes, merci de cet épisode, nous sommes effectivement peu de choses devant le hasard de notre destinée. Gageons que le ravalement de façade est un point crucial de nos destins, et j'ajouterai que la gestion de nos copropriétés est le microcosme de notre république, avec les conflits et faits divers qui y sont rattachés.

cléo a dit…

Dominique, le rendez-vous à la calèche pour voir cela...m'aurait semblé la seule garantie d'authenticité des pièces à joindre au témoignage. A défaut d'usage de faux pour remonter le temps,la permanence comme lieu d'un voyage immobile? La garantie d'accueillir encore plus de fidèles ce jour là...