14 mai 2009

Les 400 coups de Mia



Cannes : chronique n°1


Minimaliste. Comment pourrait-on qualifier autrement la Cérémonie d’ouverture du 62e FIF ? En effet, avec, pour unique vedette – sous prétexte qu’il prête sa voix à la version française du film de la soirée – un Charles Aznavour parfaitement transparent, cette présentation vite expédiée ne laissera pas un grand souvenir. Même si on peut quand même retenir le tableau un peu surréaliste d’un public entièrement équipé en lunettes 3D transformant l’honorable auditorium Lumière en une Convention du fan club de Michel Polnareff

Au-delà de la cérémonie, c’est le Festival lui-même qui débute mollement avec un film d’animation standard et un film chinois plutôt tristounet. Heureusement qu’avec « Fish tank » le cinéma réaliste anglais relève le niveau d’un début de compétition décevant pour un Festival que l’on annonce de tous côtés comme étant un grand cru.


« Là-haut » (Up), Pete Docter (USA)

Un veuf un peu grincheux qui a toujours rêvé de partir à l’aventure s’enfuit en Amérique latine pour échapper à la maison de retraite. Il le fait avec sa maison entraînée, telle une nacelle de montgolfière, par des milliers de ballons multicolores gonflés à l’hélium par ses soins. L’histoire est poétique, le relief 3D spectaculaire, mais ce énième film d’animation pour enfants (sans véritable clin d’œil pour les adultes) avait-il sa place en ouverture du Festival ?

Je ne le pense pas. Mais je ne suis peut-être pas tout à fait objectif, car je n’ai jamais accepté que l’esthétique Pixar supplante celle de nos bons vieux Disney d’antan… Nostalgie quand tu nous tiens !


« Nuits d’ivresse printanière », Lou Ye (Chine)

A Nankin, l’épouse de Wang engage Luo pour espionner son mari qui s’avère la tromper avec Jiang, un autre homme. Troublés, le détective amateur et sa petite amie Li Jing font ami-ami et même un peu plus avec Jiang. Ce méli-mélo sentimentalo-sexuel est régulièrement perturbé par Wang et son hystérique de femme.

Le problème est qu’après une première scène bien maîtrisée sur les amours clandestines des deux hommes sur une île pluvieuse, on se perd dans ce tourbillon crépusculaire de couples qui se font et se défont. Chez Lou Ye, la chair est à la fois faible et triste. Que ce film soit interdit de séjour en Chine ne suffit pas pour en faire un chef-d’œuvre.

Ce film - un peu arbitrairement, je l'avoue - me donne également l'occasion de pousser un coup de gueule. Depuis trois ou quatre ans, en effet, j'en ai assez des scénaristes atteints de flémingite aiguë qui utilisent de plus en plus le portable (façon Jack Bauer) pour relancer leurs intrigues et faire progresser leur histoire. La plupart du temps, sans réflexion à la Egoyan sur les NTIC et en méprisant la plus élémentaire psychologie, ils usent et abusent comme Lou Ye du procédé. En cette matinée, il faut bien le dire, ce fut la goutte (le sms ?) qui fit déborder le vase (la messagerie ?).


« Fish tank », Andrea Arnold (GB)

Mia a quinze ans et fait, comme le héros du Truffaut, les 400 coups. La maman de Mia n'aime pas beaucoup sa fille. Ou mal. Elle et le quartier populaire où elles vivent ont transformé Mia en petit chat sauvage. Un jour, Mia sera réconfortée, séduite et abandonnée par le petit ami de sa mère. Et Mia va devenir fauve.

Le spectateur reste pendant tout le film sur le fil du rasoir. Parfois, on a le sentiment que tout va s'arranger, parfois on a la sensation que tout va basculer du côté de la force obscure de cette société anglaise des exclus et des travailleurs pauvres. Andrea Arnold est au niveau des meilleurs Ken Loach.

Et si, vers la fin, Mia danse avec sa mère, ce faible rayon de soleil a peu de chance de réchauffer l'eau froide du destin écrit d'avance de cette « Rosetta » en puissance.

4 commentaires:

clotilde a dit…

cette photo va devenir un grand classique!!!

LEA exilé a dit…

La prochaine fois que je rentre à Nice, je vais placarder cette photo dans toute la fac de Lettres.
En plein partiels ça fera rire vos étudiants.

Liftedout a dit…

C'est que la photo elle est... voilà quoi...
J'ai pensé la même chose concernant l'ouverture du festiv... franchement choisir un anim, de ce style là qui plus est, ce n'était, à mon sens, pas le meilleur moyen de faire apprécier le genre... mais bon... Par contre Pixar et Disney ça n'a rien à voir... quand même... ce sont deux mondes différents...
Déception aussi de voir qu'il semblerait que You Le ne tienne pas ses promesses... enfin bon...
Rassurée par contre par Andréa Arnold... après Mike Leigh, ça fait plaisir de savoir que Loach essaime un peu partout chez lui...

Dominique a dit…

No comment. D'accord avec ces critiques. Fish Tank : très beau film. On est tendu du début à la fin.