29 septembre 2010

Le Président des riches

Depuis vingt-cinq ans, les sociologues Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon étudient au sein de la société française une bien étrange tribu : les riches. Là où beaucoup de leurs confrères s’intéressent aux exclus et autres damnés de la terre, ils ont choisi d’étudier ceux qui organisent la ségrégation sociale et en profitent.

Leur dernier ouvrage, « Le Président des riches », reprend les principales conclusions de ces travaux en insistant tout particulièrement sur les liens entre l’économique et le politique en terre sarkozienne. Ils voient d’ailleurs dans la célèbre soirée du Fouquet’s, où se sont précipitées toutes les composantes de la classe dominante – patrons du CAC 40, politiques et show-biz – l’acte fondateur du quinquennat.

Il résultait de leurs travaux antérieurs que les familles fortunées défendent bec et ongles leurs espaces en exerçant un contrôle vigilant sur leurs institutions, leurs cercles et leurs clubs. A l’école, elles veillent notamment à ce que leurs enfants fréquentent le moins possible les autres jeunes. Ainsi, la bourgeoisie s’affirme comme classe consciente d’elle-même et de ses intérêts. A un moment historique où la conscience de classe s’effrite dans les classes populaires, on serait tenté de dire, en suivant le raisonnement du couple Pinçon, que les riches sont les derniers marxistes !

Mais, la particularité du sarkozisme est que cette classe, riche entre autres de son capital social (ses réseaux, son système de relations) n’a jamais été autant en connivence avec le monde politique. Les liens entre Monsieur de Maistre et le ministre Woerth illustrent parfaitement cette proximité qui s’affiche presque sans complexes. Du coup, on comprend mieux l’entêtement du pouvoir à maintenir le bouclier fiscal ou alléger les droits de succession.

Le seul problème, précisément, est que l’actuel Président est tellement décomplexé par rapport à ce concubinage entre le monde des affaires et la politique qu’il en devient dangereux pour l’oligarchie qui pourrait choisir assez vite un représentant moins voyant.

Au final, le portrait de la République qui se dessine en pointillés derrière la démonstration de Monique et Michel Pinçon est plutôt inquiétant pour la démocratie. Alors, comment résister ? Les auteurs donnent une réponse inattendue : suivons l’exemple des riches. « Voilà des gens qui ont une éminente conscience de leur classe, qui sont solidaires quand la mode est à l’individualisme, qui sont organisés et mobilisés, qui défendent énergiquement leurs intérêts. Faisons comme eux. Battons-nous ».

26 septembre 2010

L'œuf de Colomb cantonal

Le 26 juin 2010, dans un billet intitulé « Evidences cantonales », j’évoquais l’impérative nécessité d’un rassemblement de la gauche niçoise au premier tour des cantonales si elle voulait conserver ses quatre cantons renouvelables (Nice 3 Jacques Victor, Nice 5 Patrick Mottard, Nice 7 Dominique Boy Mottard, Nice 14 Paul Cuturello) et nourrir des ambitions dans quelques autres.

En se déclarant favorable à cette proposition au cours de l’émission « La voix est libre » sur France 3 Côte d’Azur, Patrick Allemand, le premier secrétaire du PS 06, approuve une démarche, il faut bien le dire, plébicitée par les militants et les électeurs de gauche (on a pu le constater lors de la dernière manifestation), voire au-delà tant la déception et parfois la colère sont grandes contre les Pouvoirs en place.

Reste donc à finaliser cette démarche de bon sens, véritable œuf de Colomb cantonal. Et, sans sous-estimer d’éventuelles difficultés, on peut d’ores et déjà envisager une issue favorable permettant au PS et à Gauche Autrement d’enclencher une dynamique gagnante pour la gauche niçoise et, au-delà, pour tous ceux qui veulent rompre avec la politique actuelle, qu’elle soit nationale ou locale.

22 septembre 2010

Les pages que j’aurais aimé écrire (4)


Les morts est une nouvelle de James Joyce qui, sous le titre Les gens de Dublin, sera porté à l’écran par John Huston qui signera là sa dernière réalisation avant de mourir avec un film bouleversant d’humanité.

Nous sommes à Dublin au tout début du siècle dernier, un soir de Noël où la neige tombe en abondance. Chez les vieilles demoiselles Morhan, Gabriel passe une agréable soirée, convenue mais joyeuse et bien arrosée, avec sa femme Gretta et une vingtaine de convives, petits notables pour la plupart. A l’issue de la soirée, Gretta, profondément bouleversée par un chant traditionnel, va confier à son mari que jadis un jeune homme est littéralement mort d’amour pour elle. Gravement malade, Michael Furey – c’était son nom – avait chanté un soir de tempête sous sa fenêtre pour revoir une dernière fois la jeune Gretta qui allait quitter la région.

Cette révélation va provoquer chez Gabriel une douloureuse remise en question : comme la neige, la vie se dissout trop vite… ne vaut-il pas mieux vivre une passion destructrice, quitte à en mourir, plutôt que d’étouffer ses sentiments sous la grisaille d’une vie paisible ?

« L’air de la pièce lui glaçait les épaules. Il s’allongea avec précaution sous les draps et se coucha près de sa femme. Un par un, ils devenaient tous des ombres. Mieux valait passer hardiment en cet autre monde, dans la pleine gloire de quelque passion, que de s’effacer et se dessécher lamentablement au fil des années. Il songea à la façon dont celle qui reposait à ses côtés avait enfermé dans son cœur pendant tant d’années cette image des yeux de son amant à l’instant où il lui avait dit qu’il ne souhaitait pas vivre.

Des larmes généreuses emplissaient les yeux de Gabriel. Il n’avait jamais lui-même rien éprouvé de tel pour une femme, mais il savait qu’un tel sentiment devait être l’amour. Les larmes se pressèrent plus drues, et dans la demi-obscurité il crut voir la forme d’un adolescent debout sous un arbre dégoulinant de pluie. D’autres formes étaient à proximité. Son âme s’était approchée de cette région où demeurent les vastes cohortes des morts. Il avait conscience de leur existence capricieuse et vacillante, sans pouvoir l’appréhender. Sa propre identité s’effaçait et se perdait dans la grisaille d’un monde impalpable : ce monde bien matériel que ces morts avaient un temps édifié et dans lequel ils avaient vécu était en train de se dissoudre et de s’amenuiser.

Quelques petits coups légers sur la vitre le firent se tourner vers la fenêtre. Il avait recommencé à neiger. Il suivit d’un œil ensommeillé les flocons argentés et sombres qui tombaient obliquement dans la lumière du réverbère. Le temps était venu pour lui d’entreprendre son voyage vers l’Ouest. Oui, les journaux avaient raison : la neige était générale sur toute l’Irlande. La neige tombait sur chaque partie de la plaine centrale, sur les collines sans arbres, tombait doucement sur le marais d’Allen, et, plus loin vers l’ouest, doucement tombait sur les sombres vagues rebelles du Shannon. Elle tombait, aussi, en chaque point du cimetière solitaire perché sur la colline où Michael Furey était enterré. Elle s’amoncelait drue sur les croix des pierres tombales tout de travers, sur les fers de lance du petit portail, sur les épines dépouillées. Son âme défaillait lentement tandis qu’il entendait la neige tomber, évanescente, à travers tout l’univers, et, telle la descente de leur fin dernière, tomber, évanescente, sur tous les vivants et les morts. »

19 septembre 2010

Le pique-nique autrement


Pour la troisième année consécutive, Mireille et Paul Vautel ont accueilli, dans leur agréable propriété familiale de Saint-Antoine-Ginestière, Gauche Autrement pour un pique-nique fraternel.

Comme à chaque fois, il y avait les anciens et les nouveaux, les jeunes et les moins jeunes, les maîtres de la dialectique et les virtuoses de la grillade. Cette année, nous avons même eu droit en prime à une belle délégation radicale (de gauche of course) et à l’équipe dirigeante de l’Amica.

Bien sûr, cette rentrée est un peu particulière, je n’ai pas manqué de le rappeler en préliminaire. Elle va nous conduire au printemps à la campagne de renouvellement des deux élus de l’association. Mais comme la sagesse semble l’emporter au sein de la gauche niçoise, rien ne pouvait altérer la bonne humeur des participants à qui j’ai d’ailleurs proposé une « feel good campagne ».

Mais nous n’en étions pas encore là. Et chacun de partager nourriture, boisson et éclats de rire avec cette innocence qui est la marque de fabrique des dimanches à la campagne chez les Vautel.

D'autres photos sur le blog de Dominique.

17 septembre 2010

Deux questions simples

Sans entrer dans le débat (q’ailleurs quel débat ?), je constate, effaré, les dégâts de l’offensive anti-Roms du Pouvoir :
- stigmatisation d’un groupe humain,
- réveil des sentiments xénophobes d’une partie de la population,
- la patrie des Droits de l’Homme montrée du doigt par l’Europe et le Monde,
- le mensonge d’Etat devenu méthode de gouvernement.

Et je me pose deux questions très simples :
1) Quel pourcentage de la population française est en contact direct avec une communauté Rom ?
2) Que ce serait-il passé si l’UMP avait gagné les élections régionales ?




15 septembre 2010

La geôle suédoise

« Une Française emprisonnée… » : l’article occupe la quasi totalité de la page 15 de l’édition de mardi d’un quotidien national.

Il s’agit de l’histoire de Caroline, une jeune Française de 26 ans, jetée dans un cul-de-basse-fosse avec une accusation de maltraitance envers son jeune fils de six mois.

Si ce fait-divers tragique mais banal s’était déroulé en France, il aurait probablement été relaté en deux lignes par le même journal. Mais voilà, il a eu lieu dans un pays à l’Etat de droit incertain et aux geôles particulièrement inhospitalières : la Suède ! De surcroît, nous apprend le journal, la jeune femme souffre d’une maladie de la tyroïde et sa vie est donc en danger dans ce pays notoirement sous-équipé sur le plan médical !

Dire que cet article m’a irrité est un doux euphémisme : il est tout simplement la caricature de ce tropisme hexagonal qui consiste à considérer nos compatriotes arrêtés à l’étranger comme forcément innocents (il est possible que Caroline soit innocente, rien ne permet de dire que c’est probable…), les systèmes juridiques des autres pays comme quasiment moyenâgeux et leurs prisons forcément inhumaines (si vous pensez cela, je vous invite à visiter la prison… de Nice !).

C’est avec ce type de raisonnement qu’il y a quelques années, le transfert de Bernard Cantat de Vilnius à Paris était presque apparu comme une opération humanitaire et l’emprisonnement de la compagne d’un caïd mexicain comme le supplice de Sainte Blandine !

Du coup, pour des affaires qui se seraient passées en France dans l’anonymat de la moulinette judiciaire, on voit se mobiliser à la fois les médias et les plus hautes autorités de la République. Le Président – qui décidément n’en rate pas une – adore ce genre de situation qui le conduit à plaider pour un compatriote en marge d’une visite d’Etat tout en accueillant, trémolos dans la voix et regard humide, les familles éplorées à L’Elysée. C’est qu’il faut, selon une formule « compassionnellement » correcte, tout faire pour que le malheureux – ou la malheureuse – puisse passer les fêtes de Noël en famille dans ce pays de cocagne où l’erreur judiciaire est bannie qu’est la France…

A un moment où notre pays est montré du doigt précisément sur la question des droits de l’homme, cette nouvelle manifestation de l’arrogance française m’est insupportable, même si, trop souvent, elle est validée par l’opinion publique.

13 septembre 2010

Rendez-vous dans dix ans

Il y a dix ans, le quotidien local m'avait demandé de répondre au questionnaire de Proust version longue. Ce que je fis consciencieusement. Tellement consciencieusement qu’en tombant par hasard sur la coupure de presse, je me dis qu’aujourd’hui je ne changerais pas une virgule aux réponses. Il ne me reste donc plus qu’à me donner rendez-vous dans dix ans pour une nouvelle vérification. Ce qui, pour un Patrick, peut apparaître comme assez normal…

Cela dit, rien ne vous empêche de vous y coller…

Quel est pour vous le comble de la misère ?
- Voir des gens humiliés.

Votre idéal de bonheur terrestre ?
- Les festivals de l’île de Wight et de Woodstock : ma jeunesse.

Pour quelles fautes avez-vous le plus d’indulgence ?
- La naïveté.

Les héros de roman que vous préférez ?
- Le lieutenant Drogo, dans « Le Désert des tartares » de Buzzati.

Votre personnage historique préféré ?
- Cincinnatus, ce Romain qui sauva la République avant de retourner cultiver ses champs avec sa charrue.

Vos héroïnes préférées dans la vie réelle ?
- Simone Veil. Elle a imposé sa loi sur l’IVG à ses propres amis. Une personne au-dessus des partis, le symbole de l’émancipation de la femme.

Vos héroïnes dans la fiction ?
- J’ai une tendresse particulière pour Madame Bovary : victime de la condition féminine, elle se cogne à tous les coins.

Votre peintre préféré ?
- Botticelli.

Votre qualité préférée chez l’homme ?
- La tolérance.

Votre qualité préférée chez la femme ?
- La tolérance.

Votre vertu préférée ?
- L’humanisme, mettre l’homme au-dessus de tout.

Votre occupation préférée ?
- Ecrire.

Qui auriez-vous aimé être ?
- Un écrivain. Emile Zola, par exemple.

Le principal trait de votre caractère ?
- L’ouverture aux autres.

Ce que vous appréciez le plus chez vos amis ?
- Paradoxalement, qu’ils ne soient pas exclusifs.

Votre principal défaut ?
- Affronter avec difficulté les situations conflictuelles.

Quel serait votre plus grand malheur ?
- Perdre l’espoir de changer le monde tel qu’il est.

Votre couleur préférée ?
- Le bleu.

Quelle fleur aimez-vous
- La fleur de laurier.

Votre oiseau préféré ?
- Le phénix.

Vos auteurs favoris en prose ?
- Proust.

Vos poètes préférés ?
- René Char.

Vos héros dans la vie réelle ?
- Les opposants et les résistants dans les dictatures, au quotidien.

Que détestez-vous par-dessus tout ?
- Les mondanités.

Quels caractères historiques méprisez-vous le plus ?
- Ceux qui fabriquent des responsabilités collectives.

La réforme que vous admirez le plus ?
- L’abolition de la peine de mort.

Le don de la nature que vous voudriez avoir ?
- Etre un grand écrivain. Pour passer des professions de foi à la grande littérature…

Comment aimeriez-vous mourir ?
- Serein. Avec la certitude de survivre à travers ceux que j’aime…

Votre devise ?
- « Chaque pas qui mène au but est un but en lui-même ».

11 septembre 2010

Suspension très momentanée du blog

Pour des raisons techniques liées à une défaillance de ma connexion Internet, mon blog est interrompu depuis quelques jours.

Mais ça ne saurait durer... Du moins je l'espère... Je vous dis donc à très bientôt.

07 septembre 2010

De Masséna à la Libé

 L'arrivée à la Libé

De Masséna à la Libé, c’est probablement la plus grosse manifestation niçoise à laquelle est m’ait été donné de participer à Nice depuis l’hiver 95.

Une manifestation dont la précocité (un 7 septembre, on n’avait jamais vu ça…) se lisait sur les visages hâlés par un soleil d’été qui n’était pas encore un souvenir malgré le ciel plombé de ce mardi.

Une manifestation où la détermination, la volonté de peser dans le rapport de force avec le gouvernement avaient remplacé la résignation que j’avais vu s’insinuer dans les cortèges de juin.

Comme samedi, pour la défense des libertés, comme lundi, pour la défense de l’enseignement dans les collèges et les lycées, il s’agit moins de s’opposer à une réforme ou à des lois que de se battre dans un réflexe de défense républicaine pour les valeurs fondatrices du pacte social de notre pays.

Une manifestation qui avait l’élégance de s’achever dans le 5e canton, au pied de ma chère gare du Sud. L’occasion étaient trop belle pour ne pas récupérer au passage quelques pans bagnats de chez Tintin afin de reconstituer nos forces pour la prochaine manif qui, n’en doutons pas, ne tardera guère.

06 septembre 2010

Les pages que j’aurais aimé écrire (3)


Scénariste célèbre du cinéma français Pierre Bost (La traversée de Paris, En cas de malheur, L’horloger de Saint Paul, Le juge et l’assassin…) a écrit, juste après guerre, un roman intimiste : Monsieur Ladmiral va bientôt mourir. En 1984, dix ans après sa mort, Bertrand Tavernier l’adaptera pour en faire un de mes films préférés : Un Dimanche à la campagne. Ce petit livre raconte quelques heures de la vie d’Urbain Ladmiral, un vieux peintre portraitiste démodé, avec en toile de fond ses relations avec Irène, sa fille indépendante et fantasque, et Gonzague, son fils tout en admiration pour le père.

(...)
« Heureusement, Monsieur Ladmiral, au moment où Irène le quitta,ne pensa jamais à l’ingratitude des enfants, ou du moins n’en parla jamais. Il y pensa un peu plus tard, quand sa fille commença à venir le voir moins souvent ; et il y pensait surtout quand il avait l’occasion d’aborder ce sujet avec Gonzague, qui lui, était très fidèle et venait souvent voir son père, même les jours de semaine en sortant du bureau. Monsieur Ladmiral, quand Gonzague s’en allait, n’était pas très triste de le voir partir ; mais ce départ lui rappelait qu’Irène n’était pas venue depuis longtemps. Alors dans son adieu à Gonzague, on sentait toujours un peu de regret que cette visite n’eut pas été celle d’Irène. Gonzague comprenait, et il avait des jours où, en redescendant l’escalier, bouleversé, il manquait des marches, comme un amoureux éconduit ; tous les chagrins se ressemblent. »

04 septembre 2010

Liberté Egalité Fraternité


Nous étions plus de deux mille entre la place Garibaldi et le Port pour exorciser l’été de la honte. C’est assurément un beau succès pour une manifestation de rentrée sur le thème de la défense des droits de l’homme. Ce n’est pas encore une déferlante mais c’est beaucoup plus qu’un frémissement. Il est vrai qu’au-delà de l’hystérie anti-Roms et l’invention de la nationalité à géométrie variable par le ministre Hortefeux, nous vivons à Nice la douloureuse saga des demandeurs d’asile soumis à la loi de l'errance et des petits matins blêmes. Une raison de plus pour qu’organisations, militants ou tout simplement humanistes se mobilisent.

Pour masquer les difficultés du moment et notamment la navrante affaire Bettencourt, le pouvoir n’hésite pas à jouer les incendiaires avec le feu de la xénophobie. Il le fait avec cynisme car je ne pense pas que ces femmes et ces hommes du gouvernement, expérimentés et politiquement cultivés, croient un seul instant à l’efficacité de leurs gesticulations dégradantes pour l’image de la France en termes de sécurité.

Il fut un temps où certains politiques psalmodiaient sur les estrades : fraternité, fraternité, fraternité… Nous n’en sommes plus là. Qu’est-ce que la Fraternité quand l’Egalité n’est plus assurée entre les citoyens ou, plus largement, entre les hommes qui résident sur le territoire français ? Et qu’en est-il de l’Egalité si elle ne prend pas racine dans le terreau de le Liberté ?

C’est donc bien pour la totalité du triptyque Liberté Egalité Fraternité que deux mille Niçois en colère ont manifesté, dans un réflexe de défense républicaine, à travers ces beaux quartiers historiques de l’est de la ville. Ceux-là même qui accueillirent, au début du siècle dernier, tant d’immigrants.

02 septembre 2010

Non à l'enseignement low coast

Quoi ? Deux journées de grève dans l’Education Nationale dès la rentrée ? Non seulement celle générale du 7 septembre pour les retraites, mais aussi une journée spéciale le 6 septembre ?

On les entend déjà ceux qui sont prompts à critiquer ces flemmards de profs en bloc, leurs congés, leurs horaires, leur salaire…

Sauf que, sauf que… cette fois il en ira peut-être différemment. Pourquoi ? Parce que là on est allé trop loin. Là, il ne s’agit plus seulement de contester les conditions générales d’un travail devenu de plus en plus difficile avec les contraintes supplémentaires ajoutées chaque année (pourtant qui peut le nier s’il veut bien s’informer ?). Là, avec une réforme (une de plus…) qui touche à la formation des maîtres, beaucoup ont fini par se rendre compte qu’on s’attaque à l’avenir de leurs enfants. Il ne s’agit plus de la question quantitative des moyens mais de la question qualitative de la pédagogie.

Déjà, le non remplacement d’un enseignant sur deux qui part à la retraite, suscite l’incompréhension de nos concitoyens (80% des Français pensent qu’il s’agit d’une mauvaise chose). Mais affecter à temps plein dans des classes, sans aucune formation (à l’exception d’un vague et partiel tutorat-compagnonage dans les premiers mois), 15 500 professeurs à peine recrutés, ça ne passe pas. Cette « mastérisation » (bac = 5) qui consiste à remplacer l’année de formation en alternance dans les IUFM par une année supplémentaire d’études générales n’a pas seulement des conséquences sur la rémunération des professeurs (la première était payée aux stagiaires, pas la seconde) : elle a des conséquences sur la capacité de ceux-ci à se retrouver devant des élèves sans y avoir été préparés d’une quelconque manière. Or, nous ne sommes plus à l’époque de « La gloire de mon père » : revêtir l’habit de maître ne suffit plus pour s’imposer devant un public devenu très imprévisible. De plus, quand on sait que les jeunes enseignants sont ceux qui se retrouvent dans les établissements et les classes les plus difficiles, on voit à quel point cela peut être catastrophique non seulement pour eux mais aussi pour leurs élèves.

Alors peut-être que cette fois, il y aura un peu plus de voix, en dehors du milieu enseignant lui-même – à commencer par l’ensemble des parents d’élèves – pour dénoncer cet enseignement low coast à un moment où une jeunesse facebookée a plus que jamais besoin de repères et de cadres.