19 août 2009

La Gagaouzie n’a pas de frontière



Musique et danse sur la grand-place, accordéon et violon, Tati chez Kusturica : à Comrat, c’est la fête au village.

Pourtant, ce village-là est une capitale : celle de la Gagaouzie ; région dotée d’une très grande autonomie, la Gagaouzie est peuplée de turcophones de religion… orthodoxe, pas très synchrones avec la majorité roumaine de Moldavie.

Du coup, en 1994, après l’indépendance et quelques échauffourées, les Gagaouzes ont arraché au gouvernement central un statut qui leur permet de développer leur culture et leur économie sans être obligés de créer le dernier état confetti de la région.

Sur la place, la fête bat son plein et, si le rythme des mélopées est plutôt oriental, l’ambiance, elle, est russophile – un drapeau de la sainte Russie passe de main en main – voire « sovietophile » - la place donne sur la rue Lénine, axe central de la ville.

Peu importe : la position des 170 000 Gagaouzes semble sage car elle leur permet d’attendre l’Europe lovés bien au chaud dans le cocon moldave.

Plus risquée est la position des Moldaves russes de Transnistrie. Ceux-ci, au nom de l’histoire et de la culture, se sont placés sous la protection de Poutine qui poursuit méthodiquement dans la région son projet de Grande Russie encouragé par l’attitude munichoise des gouvernements européens (on se souvient des gesticulations de notre Président l’été dernier). Ils se condamnent ainsi à être dirigés pour longtemps par d’arrogants mercenaires qui ne voient pas beaucoup plus loin que le capot de leur 4X4 BMW.

Ces questions d’autonomie et/ou d’intégration dans la nation moldave n’intéressent plus les juifs depuis bien longtemps. Jusqu’à la deuxième guerre mondiale, le ghetto de Chişinău était l'un des plus importants de l’Europe de l’Est. La Shoah, dans une ville qui avait encore connu un pogrom en 1903, a réduit la communauté de 15% à moins de 3% de la population.

Marcher dans les herbes folles qui courent entre les tombes abandonnées de l'immense cimetière juif au nord-ouest de la ville, déchiffrer les noms et essayer de comprendre les destins individuels nous a, comme il y a deux ans à Cracovie, remplis d’une infinie tristesse et d’une irrépressible colère. Puissent-elles, l’une et l’autre, ne jamais s’éteindre.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Difficile depuis la France de se rendre réellement compte du morcellement de ces états, ou provinces de l'ex URSS.
Merci pour ces cours de géopolitique.
Bonne fin de voyage à tous les 2
Laurent F

Claude Raybaud a dit…

Formidable compte rendu de voyage agrémenté d'impressions politiques et historiques. Il semble que le seul héritage positif que nous ait légué Staline soit en effet celui des grands boulevards. Partout dans les villes de l'ex URSS ou de son acienne zone d'influence, il est agréable de circuler en voiture, mais aussi à pied. Et là bas, on ne parle jamais de zones piétonnes. Pour la simple raison que les villes entières sont des zones piétonnes grâce aux trottoirs très larges, aux carrefours espacés, aux passages piétons réglés à la seconde près (sic) par des feux tricolores, aux parcs immenses,et cela, même si 8 à 10 files de circulation occupent le centre des boulevards. Minsk en est peut être un des plus bels exemples.

Anonyme a dit…

now I know it!