07 février 2012

Amarcord, on se souvient : l’anecdote



Quelques jours après la publication du journal et donc de mon article (voir ce blog), Jean-louis Milla trouva sur son répondeur téléphonique un long message. La voix chaude et chantante est reconnaissable entre mille : pas de doute, il s’agit bien… d’Yves Montand :

« Bonjour Monsieur Jean-Louis Milla, c’est Yves Montand à l’appareil (…). Je me permets de vous signaler amicalement et admirativement bien entendu… Je suis surpris que dans les années 70-80, vous n’ayez pas mis L’aveu ce qui représente quand même quelque chose de très important sur le plan – ce n’est pas vis-à-vis de moi l’acteur – ce qui est important, c’est sur le plan de la dignité humaine et ce qui va dans le sens de ce que vous êtes en train de faire, me semble-t-il en tout cas. Je regrette qu’il n’y ait pas la mention une seule fois de Romy Scneider, et même Madame Rosa de Simone Signoret, vous voyez ce que je veux dire. C’est toujours délicat de faire ce genre de chose. Je sais bien que vous l’avez fait avec générosité et impartialité, je n’en doute absolument pas. Mais dans ces cas-là, vous risquez de vexer d’autres gens comme Belmondo, Delon, Depardieu, vous voyez ce que je veux dire. C’est très délicat de faire ce genre de choses, toujours. Ne me croyez pas ni peiné, ni vexé, mais je pense que L’aveu est une pièce maîtresse qui va à mon sens au-delà simplement du cinéma, parce que c’est une chose terrible et qui marque notre époque et qu’il était indispensable de la faire. Voilà, c’est tout. Au revoir, cher Monsieur et continuez à travailler. C’est très bien. »

Ainsi, par répondeur de Jean-Louis interposé, je me faisais engueuler par le grand Montand. Quel honneur ! Le roi n’était pas mon cousin… En réalité, j’aurais pu expliquer que tout cela n’était qu’un exercice d’écriture automatique. Du coup, les critiques de l’acteur de L’aveu étaient à la fois justifiées et… hors champ car il ne s’agissait pas pour moi d’une exploration exhaustive du cinéma des années 70-80, mais de quelques bouffées de souvenirs hâtivement consignées par écrit.

Mais, je n’ai pas répliqué car je ne voulais pas entamer l’émouvante simplicité de cette réaction épidermique : Montant, au faîte de sa gloire, se préoccupant de l’image du cinéma français dans le modeste bulletin des cinéphiles de Puget-Théniers…

Cela dit, j’ai, par la suite, aggravé ce contentieux. Post-mortem. En effet, dans Sur un air de cithare, il y a, parmi les protagonistes de la pièce, un personnage de « Z », film emblématique dans la carrière de Montand. Mais, hélas, il ne s’agit pas de son rôle mais de celui de… sa veuve. Je plaide d’autant plus facilement coupable que j’ai toujours eu beaucoup d’admiration pour l’acteur, le chanteur, et la conscience morale contre le stalinisme et pour Solidarnosc.

Alors, en forme d’hommage…

On se souvient du personnage de L’aveu (Yves Montand) et de ses lunettes de soudeur, résistant dans l’anonymat d’une petite cellule à la terreur sans visage d’un stalinisme en plein hiver de Prague (Costa-Gavras, 1970).

On se souvient du regard troublé et des yeux fardés de Lily (Romy Schneider), la prostituée fragile découvrant la trahison de Max (Max et les ferrailleurs, Cl. Sautet, 1971).

On se souvient de la violence des regards échangés entre Julien et Clémence Bouin, l’ancienne trapéziste brisée (Simone Signoret) dans le huis-clos étouffant de la petite cuisine de leur pavillon de banlieue (Le chat, P. Granier-Deferre, 1971).

7 commentaires:

Emmanuel a dit…

Yves Montand, un personnage aux multiples facettes et talentueux dans la chanson et le cinéma mais plutot inconstant en matière politque.
Ce n'était qu'un homme et un homme de son temps.
Luttant contre le stalinisme après avoir été stalinien et libéral sur la fin de sa vie donnant la leçon au peuple à la télévision.
Allez Ivo Livi on t'aime quand même là où tu es! Forza

bernard gaignier a dit…

Bien vu Emmanuel! Le Montand reaganien de la dernière période m'a particulièrement "gonflé". Tel ces prêtres défroqués qui deviennent plus anticlérical que Melenchon, Y Montand avait rejoint tous ceux qui assimilaient la gauche au stalinisme, tels les Glucksmann et autres "philosophes"incluant dans cette critique les sociaux démocrates qui avaient été toujours antistaliniens. A ce titre ils avaient été traités à l'époque de bien piètre manière par les staliniens qu'étaient Y Montand.; ou Glucksmann. Ils avaient simplement eu le tort d'avoir eu raison avant eux.

Anonyme a dit…

Élections à la basse-cour

Voilà plus de quatre ans qu’un coq en rien gaulois
Gouvernait sans partage et imposait sa loi.
Nombre de volatiles n’osaient le contredire
Bien qu’il fût bas sur pattes, c’est le moins qu’on puisse dire.
D’origine hongroise, ce coq trop agité
Ne laissait à personne le soin de décider.
Oui mais dans quelques mois il faudrait bien choisir
Un chef pour la basse-cour. Qui allait-on élire ?
« On ne veut plus du coq, il nous a affamés
Gardant le blé pour lui et pour tous ses poulets »
Disaient les pensionnaires de notre basse-cour.
« Voyons un peu pour qui voter au premier tour.»
Trouver un prétendant n’était pas chose aisée,
On le voulait plus grand, pas trop mou et racé.
Une faisane royale aux dernières élections
Avait perdu des plumes dans cette confrontation,
D’ailleurs perdu aussi la confiance de ses potes
Qui cherchaient quelqu’un d’autre pour battre le despote.
Un jars avait la côte, vieux mâle grisonnant ;
Dominer et niquer, tel était son passe-temps.
Partout, dans chaque recoin, on le voyait le soir
Sauter toutes les oies, qu’elles soient blanches ou noires.
« Pas question de le prendre, il pense trop à la chose.
Qu’il aille se faire soigner, que nos oies se reposent »
Clamait un fier dindon venu droit de Hollande
Qui jurait d’exaucer jusqu’aux moindres demandes.
Il avait réussi à se débarrasser
D’une grosse dinde chti qui voulait s’imposer
En cherchant le soutien des poules et des faisanes
Par l’interdit des œufs de plus de trente-cinq grammes.
Ce Dindon courtisait une cane colvert.
Migratrice, elle venait d’un pays où l’hiver
Est plus rude qu’en France et pour son grand bonheur
Avait mis hors combat un pigeon voyageur.
Au demeurant jolie, elle jugeait qu’il fallait
Pour pouvoir l’emporter promettre aux poulets
Nourriture plus saine, une vie plus aisée,
Maïs sans OGM et blé labellisé.
Le Dindon disait oui mais en réalité
C’était juste pour lui prendre les voix qu’il convoitait.
Et pour tout perturber, voila qu’un vieux poulet
Qui avait trépassé, était ressuscité.
Prétextant qu’il avait ainsi côtoyé Dieu,
La place de dirigeant, il appelait de ses vœux.
Ajoutez à ceux là une sorte de poule d’eau,
Une espèce marine qui parlait fort et haut
Et voulait Allah porte de son beau poulailler
Mettre ces poules cou nu qui avaient immigré.
« Elles viennent nous envahir et manger notre blé
Si on les laisse faire, nos cous elles vont plumer.
Renvoyons les chez elles à coups de pieds aux cul(e)s, !»
Tels étaient les propos de notre gallinule.
Il y en aura bien d’autres d’ici les élections,
Candidats qui voudront susciter des passions,
Des paons et des canards essayant de faire croire
Que dans la basse-cour il faut reprendre espoir,
Que le bonheur est là, juste à portée de patte.
Vous y croyez vraiment ? Mais que vous êtes tartes !

Marianne Clairobscure a dit…

J'aime vos propos mesurés et tolérants envers ce grand artiste, oui ce n'était qu'un homme, mais quel homme ! Touchante, cette intervention de la star sur un article local... au sujet capital ! Je préfère un artiste engagé qui se trompe et se ravise à un amuseur indifférent aux affres du monde. De plus, Nice, voisine de la "Colombe d'or" et de son Italie originelle, ne pouvait lui être indifférente...

Rita Gosti a dit…

Yves Montand était un grd grd Monsieur, il avait tous les talents........Je l'aimais bcp.........

Thierry Murcia a dit…

Un grand homme qui admettait ses erreurs....Rare en ce moment !!!

Le Mouton Enragé a dit…

D'abord, j'ai enragé.
Ensuite, j'ai relu.
Pour finir, le fait de détester Montand sous toutes ses formes, mais d'apprécier l'auteur et certains commentateurs de ce blog a été source de questionnements, puis de tentative d'approfondissement de quelques vertus, comme la tolérance et l'ouverture d'esprit.
Merci à tous pour ces éclairages différents.