17 août 2008

On dirait le Sud

Photo DBM

Carnet de voyage n°3

Après Memphis, Tennessee, nous continuons notre descente vers le sud des Etats-Unis par la Great river road, en suivant, au milieu des champs de coton en fleurs, le Mississippi. Parfois les routes deviennent tellement secondaires qu’une rencontre exotique n’est pas à exclure : ainsi ce tatou à l’allure débonnaire qui a tranquillement traversé la route devant notre voiture…

Etape à Natchez, ancienne place forte commerciale et militaire, devenue petite ville endormie au bord du fleuve qui rêve, à l’ombre des résidences à la Scarlett O’Hara, à sa grandeur passée. Natchez, dont le nom évoque une tribu de Natives exterminée vers 1750 par les colons français, ce qui tend à prouver que le génocide des Amérindiens n’a pas été le monopole des Anglais et des Espagnols.

Encore quelques centaines de kilomètres et « on dirait le Sud, un pays qui ressemble à la Louisiane »… à part que là, cher Nino, c’est vraiment la Louisiane, avec ses bayous pleins d’alligators (pas vraiment débonnaires ceux-là…), ses highways sur pilotis, ses plantations de canne à sucre, ses orages d’une violence extrême. Avec aussi l’arbre d’Evangéline et la charrette de Pélagie car nous sommes aussi en pays cajun. Avec enfin, tout au bout de la route, New Orleans, la fausse capitale de l’Etat, la vraie étant Baton Rouge.

Quand vous arrivez à New Orleans, par l’interstate 10, le premier bâtiment que vous identifiez est le Superdome, le grand stade de la ville. Or celui-ci est une véritable métaphore de cette Amérique que nous aimons tant et qui nous donne tant de raisons de la détester. Le Superdome est en effet une prouesse architecturale puisqu’il est le plus grand stade couvert du monde. Mais il est surtout connu pour avoir accueilli des milliers de réfugiés victimes des inondations provoquées par l’ouragan Katrina. Chacun pouvait prévoir – et les pouvoirs publics en premier – les conséquences de la destruction des vieilles digues qui protègent la ville depuis des siècles en cas d’ouragan, et c’est ce qui arriva. Les services publics, défaillants pour prévenir la catastrophe, furent encore plus absents lorsqu’il fallut porter secours à la population. Résultat : environ 1800 morts et, aujourd’hui, 250 000 personnes en moins dans une ville qui en comptait auparavant, 500 000. Au final, l’administration pas vraiment repentante va reconstruire les digues à l’économie, si bien qu’aujourd’hui, si une sœur de Katrina avait la mauvaise idée de fondre sur New Orleans, la ville serait à nouveau inondée.

Cela dit, le quartier français, construit par les pionniers au-dessus du niveau de la mer, n’a pas souffert de la catastrophe, et représente toujours cette Nouvelle-Orléans éternelle avec ses maisons aux balcons en fer forgé et de la musique à chaque coin de rue. Durant notre séjour dans le French quarter, la musique, ce fut partout et tout le temps. Nos préférences : Steamboat Willie, le musicien du patio de la Bourbon street, dont le jazz semble s’échapper tout droit de la bande son d’un film de Woody Allen, et le quinqua barbu qui chaque soir vient chanter dans un jardin public, face au Mississippi, des ballades folk avec le fleuve comme unique témoin, le fleuve et quelques passants. Nous eûmes la chance de passer par là.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Très intéressants commentaires de votre voyage aux USA. Je vous ai précédé en juin en visitant Washington et Philadelphie. Et je voyais que des bâtiments publics des années 30 (ministères, gares, etc...)n'avaient rien à envier à des bâtiments construits à la même époque par les régimes soviétiques ou nazi. C'était le style architectural du moment (béton brut, ouvertures massives et droites...). Et je ne pouvais m'empêcher de penser - peut être un peu naïvement - que si Hitler et Staline s'étaient rendus aux USA, peut être auraient-ils compris qu'ils n'étaient pas les seuls à étaler leur puissance, et peut-être se seraient-ils tenus tranquilles? C'est pourquoi, je pense que les rencontres à tous les niveaux (officiels entre chefs d'Etats mais aussi entre particuliers (touristes, étudiants, professionnels...)est une des pistes qui peut limiter les risques de conflits dans le monde.

Anonyme a dit…

irene a dit...
eh oui Patrick!!! je te reconnais bien là... même à des milliers de kilométres ce plaisir que tu as de nous faire partager tes émotions, et de nous emmener en voyage.. ( tout en étant instructif...) " merci Monsieur le professeur... on ne vous oubliera jamais HIHI...see you soon

Anonyme a dit…

Merci pour vos commentaires de voyage Patrick. Ne pouvant prendre de vacances depuis plusieurs années cela me distrait agréablement et me fait un peu rêver.

Anonyme a dit…

On dirait le sud...

La nouvelle Orléan se situe en dessus du 30ème parallèle, elle est 1500 kilomètre plus près du tropique du Cancer que Nice: en terme de lattitude, comparés à ses habitants, les Niçois ne sont pas des chtits, ce sont carrément des scandinaves.

Pour parler de Katrina et de la manière dont la tempête a été traitée, il faut se rappeler qu'il fut une époque, pas si éloignée, durant laquelle les États-Unis avaient la réputation (justifiée) d'avoir la meilleure organisation au monde pour ce qui concernait les secours en cas de catastrophe naturelle. Puis George Junior vint, et décida que cette structure devait être réorganisée: il remplaça, fit muter, offrit des promotions placards aux dirigeants des différentes structures liées à la prévention des catastrophes et à l'organisation des secours quand elles se produisaient, et mit à leur place de vieux alliés et courtisants du clan Bush, tous plus incompétants (et donc d'autant plus dépendant vis à vis de celui qui les avait mis là) les uns que les autres, qui firent preuve d'un remarquable zèle pour court-circuiter tous les scientifiques, experts, observateurs, citoyens concernés, qui avaient le malheur de penser que peut-être les écolos n'avaient pas tort quand ils parlaient des conséquences du réchauffement climatique. Pendant cinq ans, climatologues, ingénieurs hydrologues, élus locaux, tentèrent de prévenir Washington, leurs mises en gardes de plus en plus désespérées au fur et à mesure que les recherches et les observations s'affinaient et confirmaient les plus pessimistes scénario, répétant encore et encore que les digues allaient lâcher. On a vu ce qui s'est passé, et il n'est pas très étonnant de voir un climatologue comme James Hansen perdre son calme et accuser responsables politiques et économiques de crime contre l'humanité.

Anonyme a dit…

Bonjour aux voyageurs. De retour de Santander, j'apprécie tes images et séquences musicales. En rebond sur le carnet de voyage 1 sur les "vacances de la rupture", as tu déjà remarqué l'écoulement du temps comme il devient calme, et s'allonge lors de ces voyages.
On en revient "autre" avec la forte impression d'un insondable temps écoulé.
Et cela m'amène à penser à nos souvenirs d'enfance, comme le temps était long, un été semblait interminable.
Ce sont les images neuves que nous découvrons et que notre conscience enregistre, ces images balisent notre sensation du temps, et leur identité remarquable est vecteur de la sensation du temps.
Dans la routine, aux balises usées à la corde, ce même temps aurait paru un éclair, en voyage, nous avons bien affaire ici, et maintenant, à une éternité.

PS: J'ai également eu affaire à une Opel Kadett increvable, qui m'a enmené trois fois en des épopées de 8 ou 9000 km, et qui m'a occasionné au total comme pannes: Une crevaison! Certes, il a fallu enlever le thermostat pour soulager les durites lors des 48° Sahariens, mais à part celà, que du bonheur!