23 mars 2009

Le Père-Lachaise du 5e canton


Coincé entre l’église, le couvent, les entrepôts d’une entreprise de matériaux lourds et une école, il existe, au sommet de la colline de Saint-Barthélemy, un petit cimetière de campagne.

J’aime flâner de temps en temps dans cette enclave proche du centre géographique du 5e canton, petit morceau de Toscane calme et serein pourtant situé à vol d’oiseau à moins de cent mètres de l’agitation du boulevard Gorbella.

Mélange de tombes traditionnelles et de mausolées à l’italienne,le cimetière a même, dans sa partie haute, un mini columbarium. Se promener dans les allées à forte déclivité permet bien sûr de retrouver les « stars » du lieu, mais aussi d’aller à la rencontre des humbles, des sans grades, des oubliés… Les monuments funéraires sont parfois étonnants. Que dire, par exemple, de ce gisant si réaliste sous sa chapelle et qui rend un hommage quelque peu lugubre à un gosse de vingt ans mort en 1917, comme il se doit, « pour la France »…

Quant aux « stars », elles sont quand même assez nombreuses pour un si petit cimetière.

Tout d’abord, à tout seigneur tout honneur « autrement » (je pense bien sûr au « 3 » puis au « 10 »), dès la première rangée, on peut se recueillir sur la tombe de Cyrille Besset. Peintre paysagiste aujourd’hui oublié, l’artiste peut se consoler en observant en contrebas passants et circulation sur l’avenue qui porte son nom.

Ensuite, on peut retrouver deux femmes qui ont énormément compté dans la vie de Guy de Maupassant : sa mère, Laure Poitevin de Maupassant, qui repose depuis 1903 dans une tombe modeste, presque abandonnée, et une de ses maîtresses, la Comtesse Emmanuella Potocka. Celle-là même qu’il surnommait sa « gamine » et à qui il écrivait : « Je t’aime, je te cherche. Je tiens encore ton ombre chaude dans mes bras ». Du coup, on se recueille devant la chapelle funéraire de cette inconnue car on a toujours le sentiment que la maîtresse d’un artiste est bien plus qu’une maîtresse…

Autre rendez-vous émouvant : la tombe de Jean Behra, champion automobile des années cinquante, mort en course, et enfant chéri du quartier dont une rue porte le nom. Sur la photo de la pierre tombale, avec son casque rond, il donne l’impression de sortir tout droit d’un des premiers albums de Michel Vaillant.

Enfin, d’escaliers en recoins, d’allées en chapelles, on retrouve quelques grands noms niçois : la famille Arson (la villa éponyme est à quelques dizaines de mètres du cimetière), les Spitalieri de Cessole, Alexandre Durandy, Jacques Pauliani (à qui l’on doit l’hospice – aujourd’hui maison de retraite – qui porte son nom) ou Paul Bounin, fabricant d’huile et conseiller municipal, qui a donné son nom à une rue du canton… où j’ai failli habiter !

Mais un constat s’impose. Ce petit cimetière est plein comme un œuf, à la limite du surbookage… Dommage ! Après cinq ou six mandats, je me serais bien vu prendre mon éternel repos sur la colline inspirée de Saint Barthélemy, comptant les nuages blancs, papotant avec le gisant et les anges en plâtre, surveillant avec bienveillance mon successeur au Conseil général…

A l’évidence, ce ne sera pas possible. Du coup, si je n’ai qu’une idée très approximative du royaume qui m’attend, j’ai désormais la certitude que sa conquête commencera par un exil… cantonal !

13 commentaires:

Claudio a dit…

"... vulgairement parlant, il est plein comme un œuf et d'ici que quelqu'un n'en sorte..." chantait Brassens. Plage pour les uns ou cantons voisins pour les autres. J'ai une autre solution : il suffit de ne pas mourir. Mais, il faut y croire bien fort.
Merci pour cette "Balade (du) cimetière"

Anonyme a dit…

La description est fidèle et agréable.Mais chaque fois que j'y passe, je me demande comment si prennent les agents immobiliers pour vanter la vue imprenable...et en plus sans vis-à-vis...., des appartements parfois à la vente de l'immeuble qui surplombe ce lieu.
ricciarelli

Unknown a dit…

En fait une situation assez semblable à celle de l'Ibis Montmartre qui domine le célèbre cimetière...au fait monsieur Ricciarelli merci pour le message gourmand depuis déja longtemps consommé :-)))

Anonyme a dit…

Pour célébrer l'arrivée du printemps, vous avez choisi la plus bucolique des promenades " a la recherche des tombes perdues " (je n’ai pas pu m’en empêcher..)
»Les monuments funéraires sont parfois étonnants »je me souviens de ma visite au cimetiere du père lachaise ,un dimanche pluvieux et ma stupéfaction ,entre autre ,face a la tombe d'Oscar Wilde recouverte de baisers de ses admiratrices ;transformée en sorte en icône érotique..
C’est une évidence lors de ma prochaine visite Nicoise direction la colline de Saint Barthelemy .
Penelope

Anonyme a dit…

Très belle visite. Ca me donne encore plus envie de revenir à Nice...

Anne-Marie Kounga

Anonyme a dit…

Je me rappelle les cimetières de l'ile de la Réunion, avec les frangipaniers et hibiscus, si beaux et odorants que j'ai affirmé alors que ces lieux étaient "vivants".
Très dans la métaphysique, surtout après ton post précédent, j'ai parfois cette rassurante pensée qui me dicte, et ceci à coup sûr, qu'une éternité nous ayant précédé sans que gène se manifeste,une autre nous succèdera sans plus de tracas!

Anonyme a dit…

Tsss tsss Mr Mottard....joli billet mais au 21 éme siècle il est temps de braver les préjugés, et de se rendre compte ou d'oser croire que la mort n'est qu'une illusion , un retour à la source, un passage....Constat infondé , présomptueux ? Pas tant que ça, lisez donc les ouvrages d' Elisabeth Kubler-Ross, médecin, psychiatre, thanatologue reputée dont beaucoup sont parus en livre de poche.Sans compter les innombrables témoignages, inspirations et messages de l'au-delà d'hier mais aussi d'aujourd'hui que les bonnes âmes feignent d'ignorer mais dont certains valent largement la peine de s'y plonger à un moment de sa vie; pas forcément pour croire mordicus à quoi que ce soit mais pour être éclairé ou avoir l'intuition de de ce qu'est ou peut être la vie aprés la vie....c'est à dire la vie dans une autre dimension, un "autre plan d'existence ou la soufrance et l'angoisse sont inconnues" sans corps physique mais ou l'esprit subsiste et reste créateur... "Tout dépend de la façon dont vous avez mené votre existence" dit E.Kubler-Ross et aussi "La mort en elle-même est une chose merveilleuse et positive" Et cela vient d'une femme qui a accompagné dans sa vie des milliers de personnes à la fin de leur voyage terrestre.....Victor Hugo disait la même chose mais pour la plupart d'entre nous nos croyances matérialistes dans la finitude nous protègent d'une grande remise en question, qui est pourtant une fantastique source et ouverture de sens et de lumière.

Anonyme a dit…

Comme toi j'aime flâner de temps en temps dans ce lieu plein de charme et je connais bien le caveau où se trouve le gisant de Georges Dalmas. Ce caveau abrite aussi une autre " star" : le célèbre architecte niçois Charles Dalmas qui a construit le Ruhl, le Spendid , le Palais de la Méditerranée, le Royal,le Scribe, l'Hermitage, le Carlton à Cannes et un grand nombre de Palais niçois. /Users/henricottalorda/Desktop/Charles Dalmas 1863-1938.JPG Henri COTTALORDA

Unknown a dit…

je suis en effet très intrigué par les écrits de Kubler-Ross

Anonyme a dit…

Dans la même ligne directrice mais dans un style différent tu peux lire aussi "La Mort Intime" de Marie de Hennezel...

Céleste a dit…

Marie de Hennezel qui est célèbre pour avoir dialogué sur ces sujets avec un certain.... François Mitterand...

Anonyme a dit…

comment la chapelle funéraire d emma uela potocka peut elle etre a nice alors qu elle est enterree au pere lachaise?

Unknown a dit…

C'est en effet un grand mystère...! Je vais mener l'enquête...