Dimanche 15 janvier : Michelle Bachelet gagne l'élection présidentielle au Chili. Une femme de gauche triomphe dans un pays qui, il y a encore quelques mois, n'osait pas condamner Pinochet... Quel symbole !
Retour vers le passé.
C'était en septembre 1973, dans un camping de la périphérie d'Athènes. La rumeur se propage à travers les oliviers, de tente à tente, de transistor à transistor : la Moneda est en flammes, il serait mort, il est mort...
Instantanément, sans avoir besoin de vérifier la nouvelle, avec Dominique et Luc, nous comprenons qu'à dix mille kilomètres de là, c'est l'espoir d'un monde plus juste qui est en train de se consumer avec l'austère palais présidentiel. Et dans nos têtes, petite musique lancinante pour grande manifestation colorée, le slogan de nos vingt ans : «El pueblo unido jamás será vincido !»
C'est que nous avions beaucoup investi sur notre Jaurès des antipodes. Avec lui, nous avions fini par croire que, sous le soleil de Santiago, le peuple pouvait refuser et la jungle et le zoo... Avec lui, nous avions rêvé à une troisième voie : celle qui allait réconcilier la révolution et la démocratie, Che Guevara et Olaf Palme. Génération épargnée par les guerres, nous avions oublié que l'Histoire est tragique. Ce soir-là, elle s'est rappelée à notre bon souvenir...
Retour vers le futur.
Incontestablement, l'élection de Michelle Bachelet est une étape supplémentaire dans le processus qui fait, dans le sllage de Lula, basculer le continent latino-américain dans le camp du progrès. Et cela - malgré quelques poussées populistes comme au Venezuela - plutôt sous les couleurs de la social-démocratie.
Ce mouvement de fond - l'élection d'Evo Morales en Bolivie en est une récente illustration - est porteur d'espoir. Celui d'avoir des sociétés plus justes en Amérique latine, dans le respect des populations autochtones (élection d'un indien) et le rejet du traditionalisme sociétal (élection d'une femme). Cet espoir que Lula a su si bien incarner est une absolue nécessité pour des sociétés qui restent probablement parmi les plus inégalitaires de la planète.
Mais au-delà de cette heureuse évolution, c'est sur le plan géopolitique que les changements en Amérique du Sud peuvent se révéler déterminants pour tous ceux qui militent pour un autre monde. En effet, c'est toute une puissance régionale qui est en train de se bâtir en prenant ses distances avec les Etats-unis d'Amérique. Associée à d'autres puissances en devenir comme l'Afrique du Sud et l'Inde, c'est tout l'équilibre (ou plutôt le déséquilibre) des rapports Nord-Sud qui peut être remis en cause.
Pour la première fois depuis la chute du Mur, on peut se prendre à rêver à un monde multipolaire. Bien sûr, l'évolution en Amérique latine n'est pas linéaire : Lula est actuellement en difficulté, l'élection d'Ollanta Humala au Pérou poserait autant de questions qu'elle apporterait de réponses, les dérives à caractère antisémite de Chávez ne peuvent qu'inquiéter...). Mais globalement, il semble qu'une dynamique est en train de se développer.
L'Union européenne se doit d'apporter son aide à ce mouvement de fond. Mais le peut-elle ? Le veut-elle ? Ceci est une autre histoire.
16 janvier 2006
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3 commentaires:
Avant d'accuser Chavez d'antisémitisme, lisez cela, par exemple:
http://www.voltairenet.org/article133475.html
Et si les descendants de ceux qui crucifièrent le Christ étaient les descendants de l'empire romain, i.e. les pays occidentaux?
Un internaute méfiant
C'est lu. L'exégèse, c'est bien, mais je ne serai pleinement convaincu que lorsque l'auteur des propos lui-même précisera quelle était vraiment sa pensée, excluant par là-même toute ambiguïté...
Il semble bien que H.Chavez ait levé toute ambiguïté:
http://www.humanite.presse.fr/journal/2006-01-17/2006-01-17-822044
(fin du 3ème paragraphe)
Ce qu'en dit J.L.Mélenchon est aussi assez convainquant:
http://www.jean-luc-melenchon.fr/article/blogview/64/1/1
L'internaute méfiant.
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